D I O C E S E   D E   L A G H O U A T – G H A R D A I A

Bien chers amis,

Ce mois de septembre est marqué par l’entrée des Musulmans en Ramadan, mois de jeûne et de fête à la fois, mois de prière et de solidarité avec les plus démunis.
Pour nous, chrétiens, c’est sûrement durant cette période que nous ressentons le plus à la fois notre différence et notre désir de communion. Ce temps ne nous laisse pas indifférents, il marque notre vie, notre horaire, notre relation à l’autre, mais aussi notre propre prière. Il renforce les liens d’amitié parfois concrétisés par une invitation au " ftour ", repas de rupture du jeûne.

Malheureusement, une fois encore dans le pays cette entrée en Ramadan est marquée par des attentats atroces où des victimes innocentes ont laissé leur vie. Des familles entières sont endeuillées par ces actes absolument injustifiables. Et que dire lorsque ceux qui les téléguident prétendent le faire au nom de Dieu ? Aucun acte de violence ne saurait être couvert par Celui qui est le Maître de la Vie.
Chrétiens pour la plupart étrangers, nous ne pouvons rester dans une attitude de " voyeurs " devant ce que vit ce pays, dans le meilleur comme dans le pire. Nous souffrons de voir des familles frappées par le deuil, nous souffrons de voir  l’Islam une fois encore discrédité à travers ces violences qui fatalement vont en " justifier " d’autres. Cette spirale infernale, ne peut pas venir de Dieu. C’est Lui le premier qui est touché, blessé, voire même anéanti dans des consciences qui ne peuvent admettre un Dieu vengeur, construit à l’image de ce qu’il y a de moins bon dans l’homme ! Ils préfèrent se détourner de ce Dieu là et nous ne pouvons leur donner tort ! Quelle image de Dieu, nous aussi, chrétiens, transmettons-nous aux autres ?

Pendant ce mois de Ramadan, nous sentons donc davantage notre " étrangéité " et, paradoxalement aussi, notre désir d’une plus grande fraternité avec ce peuple. Très rares sont les membres de nos communautés qui ont la nationalité algérienne. Notre statut d’étrangers est à la fois une chance et une limite.
Ce qui doit nous marquer d’abord, c’est une fraternité vécue à l’échelon universel. Et de ce point de vue, nous sommes bien servis, venant d’horizons si divers par l’ethnie, la culture, la langue, la nationalité. Cette universalité fait partie de notre vocation.
Et nous ne sommes pas les seuls à le vivre. Le dernier des 40 hadiths les plus célèbres attribués au Prophète de l’Islam dit " Sois en ce monde comme un étranger ou un passant en voyage ". La condition d’étranger ne serait-elle pas celle de tout croyant ? Déjà, un chrétien anonyme de la fin du 2eme  siècle écrivait à  son ami Diognète : "…Car les chrétiens ne se distinguent des autres ni par le pays, ni par le langage, ni par le vêtement. Ils n’habitent pas de villes qui leur soient propres  ils ne se servent pas de quelque dialecte extraordinaire, leur genre de vie n’a rien de singulier… ils se conforment aux usages locaux pour leur vêtement, leur nourriture et la manière de vivre, tout en manifestant les lois extraordinaires et vraiment paradoxales de leur république spirituelle…Toute terre étrangère est leur patrie, et toute patrie une terre étrangère… ".
Si notre Patrie, c’est Dieu alors partout nous sommes des citoyens, partout nous sommes des étrangers.


+ Claude, votre frère évêque.