Amis du Diocèse du Sahara (ADS)
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(retour par ce sommaire pour chacune des traductions)
le 1er septembre 2011

« RENCONTRE AVEC LE PAPE. L’Islam et le dialogue interreligieux »
de Mustapha Chérif

(Ed. Odile Jacob / barzakh).
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de  Mgr Rault,

Mustapha Chérif, philosophe musulman et chercheur, professeur à l’Université d’Alger, est engagé depuis assez longtemps dans le vaste champ du dialogue islamo-chrétien. Ses connaissances sont très larges dans les domaines de la culture, des religions et des civilisations. Il a représenté l’Algérie comme Ambassadeur au Caire pendant plusieurs années, mais c’est dans la recherche et l’enseignement qu’il a tenu à poursuivre sa carrière d’intellectuel de renom.

Un événement l’a mis dans la pleine lumière de l’actualité : c’est sa rencontre avec le Pape Benoît XVI. Je préfère le laisser s’exprimer lui-même sur cette expérience assez unique :

« Le samedi 11 novembre 2006, le Pape Benoît XVI me recevait au Saint Siège de la Cité du Vatican à Rome, le cœur même du Christianisme. J’étais le premier musulman à rencontrer le Pape pour parler de l’Islam. J’avais tenu à le rencontrer dans le cadre du dialogue interreligieux. Il m’a prêté son attention près d’une heure durant. Ce que je lui ai dit est le récit de ce livre. Il s’agit de la narration d’une audience privée, en tête à tête, dans son bureau personnel ».

Son livre déborde très largement cet entretien qui en est le point de départ. Il saisit cette occasion pour dire sa profonde conviction quant à la nécessité du dialogue : « Il n’y a pas d’alternative au dialogue, même si le chemin est semé d’embuches… (Prendre le parti du dialogue), c’est en tous cas courir le risque de subir la vindicte ou de se faire traiter de naïfs ou d’idéalistes ».

Ce risque, il le prend avec courage, rigueur et compétence, sans tomber dans les concessions faciles aussi bien du côté de l’Islam que du Christianisme. Il parcourt ainsi cette longue aventure du Dialogue dans les dédales de l’histoire passée et présente. Convaincu que ces deux religions ont un rôle à jouer dans la société, il prône un dialogue courtois mais rigoureux, aussi bien dans le domaine des idées que dans celui du comportement mutuel. Il n’en masque pas les risques, et ne craint pas de s’engager sur le terrain de l’actualité politique, avec un développement large et soucieux d’objectivité sur la délicate question palestinienne.

Attentif à pas se cantonner dans des débats intellectuels, il prône aussi le dialogue de la convivialité et rend ce bel hommage aux Eglises du Maghreb : « Les évêques et les prêtres le savent et l’affirment : la spécificité des relations islamo-chrétiennes des les églises du Maghreb enrichit les expériences de dialogue vécues en Europe et contribuent à désamorcer les réactions de peur et de refus de l’Islam en Occident »

J’ai lu ce livre, édité en Algérie, avec beaucoup d’intérêt, et je le recommande à toute personne engagée dans le dialogue islamo-chrétien, dont il rappelle les exigences et l’urgence dans le contexte de la sécularisation.

+Mgr Claude Rault   .aidelfitr11_fichiers/bijousahara.jpg

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De la rédaction du Site ADS,  petite revue de presse et documents

Acculturation et multiculturalisme
par Mustapha CHÉRIF (*)

«La mondialisation et la modernité ne doivent pas signifier dépersonnalisation et dépendance.»

A l’heure où les musulmans de par le monde commémorent la naissance bénie du Sceau des prophètes [PBDSL] et recherchent les voies pour s’inscrire dans le progrès et accorder la raison et la foi, le spécifique et l’universel, sujets culturels permanents pour toutes les générations, en Occident il est aujourd’hui devenu banal, notamment en termes électoralistes, de se déclarer islamophobe. C’est un racisme et une xénophobie, prolongement pernicieux de l’antisémitisme. Cette posture inadmissible nourrie par les préjugés, de la part de gens qui disent parfois n’en avoir qu’aux extrémistes et non pas aux musulmans, dérive sournoisement vers le rejet de l’Islam. C’est un phénomène inquiétant marqué par l’amalgame inique et le bouc émissaire.

Eduquer à l’acceptation de la diversité

Dans ce contexte, en Europe, au plus haut niveau est contesté le multiculturalisme; alors que ce mode n’exclut pas l’acculturation, c’est-à-dire l’adaptation à la culture locale dominante. Le multiculturalisme est la cohabitation de groupes culturels différents mais qui respectent les valeurs, les lois et les institutions du pays où ils résident. L’acculturation est un processus d’adaptation aux normes et valeurs culturelles locales dominantes. L’un n’empêche pas l’autre. La logique de la diversité est légitime. La remise en cause du multiculturalisme, pratique sociale aussi ancienne que les civilisations, présage de mauvais jours.
Même si tous les Européens ne confondent pas Islam et fanatisme, on constate un emballement inquiétant, est récusée la possibilité de respecter ses racines et de s’ouvrir sur le monde dans lequel on vit. Pourtant, la civilisation musulmane, issue du troisième rameau monothéiste et de la culture gréco-arabe, partage des valeurs universelles. C’est cela qui mérite d’être connu.
Les valeurs de respect de la dignité des gens et du droit des peuples furent bafouées hier par le colonialisme, les totalitarismes et aujourd’hui par des dogmatiques qui déversent leurs angoisses sur les musulmans. Il faut éduquer à l’acceptation de la diversité pour faire reculer le racisme. Les préjugés doivent disparaître. L’immense majorité des musulmans accepte le débat et la critique sans limites et nul ne peut nier que se posent pour tous les citoyens et peuples des problèmes d’articulation entre progrès et authenticité, entre unité et pluralité, et que des fondamentalismes soient visibles, mais l’heure devrait être au vivre-ensemble.
Les polémiques qui traversent tous les courants politiques européens au sujet des citoyens européens musulmans sont alarmantes, alors qu’acculturation et multiculturalisme ne sont pas antinomiques. Chacun est transformé par son milieu social et pratique des synthèses et symbioses.
Il est temps de mettre fin au sentiment antimusulman, aux faux débats et au populisme. Le malentendu persistera tant qu’on n’aura pas extirpé la principale racine du problème: la méconnaissance. Musulmans, chrétiens, juifs, humanistes, apprenons à nous connaître et à faire notre examen de conscience. L’amplification de la peur, l’exploitation avec cynisme des archaïsmes et des dérives des fondamentalismes jettent de manière inique l’opprobre sur tous les musulmans.
La propagande du choc des civilisations et la politique du deux poids, deux mesures gagnent du terrain et s’illustrent par les ingérences dans la vie des citoyens et communautés musulmanes d’Europe et celle des sociétés arabes. Aucune puissance étrangère ne peut oeuvrer pour les intérêts des peuples. La renaissance ne peut être dictée de l’extérieur. La mondialisation et la modernité ne doivent pas signifier dépersonnalisation et dépendance.
La caricature et le rejet des musulmans stigmatisés n’est pas un simple épiphénomène, mais une diversion aux impasses du système dominant. Ce n’est plus le radicalisme qui est dénoncé. Les références fondatrices, le Coran et le Prophète [PBDSL] sont attaqués. La xénophobie, d’une part, et l’intégrisme, d’autre part, tous deux déforment l’image de l’Islam.
En Europe, l’immense majorité des musulmans est bien intégrée et prouve ses compétences et qualités. Cette réalité est déformée. Comme celles de l’antisémitisme, les causes de l’islamophobie sont anciennes: l’ignorance, les situations de crise, des stratégies d’invention d’un bouc émissaire et les fondamentalismes. L’islamophobie n’est malheureusement pas une ruse difficile à mettre en pratique, car l’ethnocentrisme occidental est ancien.
Depuis 14 siècles, le Monde arabe est déformé par des non-musulmans. Les xénophobes nostalgiques de l’ère coloniale puisent dans l’imaginaire qui occulte le fait qu’entre l’Occident et l’Islam l’échange était plus décisif que les divergences. Par le passé, autour de la Méditerranée, les peuples ont fécondé une histoire riche. Le citoyen musulman de par le monde doit faire son autocritique, ne pas tomber dans les provocations, reprendre confiance et énoncer des voies pour le vivre-ensemble.

Changer l’image

En Europe, au sujet de l’Islam il y a lieu de prendre la parole pour changer l’image et contribuer au discernement, malgré le verrouillage des champs médiatiques. Il faut se démarquer des courants qui nuisent à ce qu’ils croient défendre, en montrant que le fondamentalisme est l’anti-Islam et l’antihumanisme.
Afin que le clair l’emporte sur l’obscur, chacun doit s’engager et oeuvrer aux côtés de ceux qui défendent les causes justes. C’est avec les personnes soucieuses de respect du droit à la différence que l’avenir sera préservé. Ce qui est en jeu, c’est la Cité juste, pas seulement le sort des musulmans. L’Islam réintroduit le débat de fond, celui sur la question du sens et de la justice, dans une société qui a besoin d’équilibre, car, malgré les prodigieux progrès technoscientifiques, se profile la déshumanisation.
C’est l’ère de la dégradation intellectuelle, du recul du droit, de la crise de la modernité européenne et de la tradition sclérosée en Orient. Cependant, risques et opportunités s’entremêlent. Les peuples sont confrontés à la mise en demeure de se dépasser.
Compte tenu du choc des ignorances, il est vital de garantir l’interconnaissance: pour tous les jeunes en Occident, introduire l’enseignement du fait religieux, de la civilisation et de la langue de l’autre dans les établissements scolaires, et pour la communauté, les animateurs cultuels doivent être formés à la langue et aux cultures du pays. Le dépassement de faux clivages est vital. Rassembler est la tâche de l’heure, la communauté manque de figures de proue. Le droit d’exprimer collectivement la foi doit être protégé, afin de resserrer les liens sans communautarisme.
Il reste à faire prendre conscience que les mauvaises interprétations de nos sources nourrissent le sentiment antimusulman. Ceux qui s’attachent à la gestuelle et réduisent la foi à des aspects rigides se trompent. L’’intégrisme est un contre-exemple de l’Islam. Des bricolages exégétiques renforcent le refuge contestataire. Mais les croyants sincères qui recherchent l’approfondissement de leur foi de manière paisible et ouverte sont l’immense majorité.
Par des paroles justes, des actions réfléchies, le souci du dialogue, ils seront à la hauteur de la tâche. Être musulman c’est être pieux, juste et logique, ligne civilisée et médiane. En Occident, dans des quartiers défavorisés, des citoyens de confession musulmane, au chômage, notamment les jeunes, souffrent. Il est impérieux de les écouter, en leur offrant une formation et des perspectives. Il s’agit non pas de survivre ni de se renier, mais d’être fier de ses racines, de vivre avec les autres et d’accepter l’évolution.

Durant des siècles, la coexistence et l’échange entre des populations aux parcours culturels différents caractérisaient le Bassin méditerranéen. Les dérives ne peuvent occulter la réalité. Les musulmans d’Europe participent sans complexe à la vie de la Cité. Ils prouvent leurs qualités et n’ont aucun problème à vivre avec les non-musulmans. Ils savent que leur religion fonde la sécularité et la vie sous la forme du savoir.
Il n’y a aucune opposition de principe entre les civilisations. Ce n’est pas seulement au musulman de s’adapter. Nous refusons l’arrogance avec laquelle on parle du musulman, comme s’il était susceptible de n’accéder à la dignité que s’il s’occidentalise. Nous escomptons le sens de la clairvoyance, afin que le débat sur le vivre-ensemble ne soit pas dévié. De la pertinence de la réponse dépend l’avenir du monde.
Les musulmans ne réfutent pas seulement le paternalisme et n’exigent pas seulement que leur différence soit tolérée. Ils demandent davantage qu’un simple «droit de survivre», mais le droit de vivre avec leur temps dignement. L’ordre de la tutelle est inadmissible, l’ordre de la tolérance est insuffisant, seul l’ordre de la reconnaissance du droit à la différence ouvre la possibilité d’une civilisation commune juste.
Depuis des années, nous tentons de sonner l’alerte, d’éveiller les consciences, d’attirer l’attention de tous pour dénoncer la politique du deux poids, deux mesures.
La question palestinienne est le symbole le plus significatif de l’injustice. Nord et Sud doivent d’égal à égal parvenir à des normes de civilisations, éthiques et juridiques pour un nouvel ordre juste, d’autant que les deux mondes sont imbriqués.

(*) Mustapha Cherif, philosophe, professeur des universités.
www.mustapha-cherif.net

LA CULTURE DE LA PAIX : Le vivre-ensemble juste
Acculturation et multiculturalisme
jeudi 11/08/2011 - 10:48
in
l'Islam en France,
l'environnement des musulmans en France


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La cohabitation entre citoyens est fondée sur bien plus qu'une simple tolérance.

Jeûner, c'est se mettre en état de paix. A celui qui peut nous importuner, nous devons paisiblement répondre: «Je jeûne». Le concept de Paix en Islam est central, en plus d'être un des beaux noms de Dieu, Salam, dont l'importance est au moins égale à celle de Rahman, le Miséricordieux. C'est une culture de la paix à laquelle appelle, en premier lieu, le Ramadhan. Ce concept est directement lié au vivre-ensemble. Dans ce sens, la paix exige une reconnaissance de l'autre. Tout en précisant qu'il n'y a pas de paix sans justice. L'acte qui traduit cette orientation est celui du partage, qui doit s'effectuer de manière raisonnable. Accueillir la différence, à titre personnel, dans la relation humaine, doit se faire dans la plus grande des ouvertures. L'hospitalité est une vertu.

La responsabilité du musulman

Le concept de paix en Islam dépasse tous les autres: il est religieux, humain et culturel et au-delà. Les qualités du croyant, généreux, hospitalier, bon, convergent toutes dans le sens d'instaurer la paix vis-à-vis de soi, de l'autre et du monde. La Constitution de Médine mise en place par le Prophète, reflète le concept de paix et celui de l'accueil de la différence.
Ce qui définit, en priorité, l'identité des êtres dans la Cité n'est pas la confession, le culte ou la religion, mais la citoyenneté. En effet, la sécularité et les droits humains y sont affirmés. En Islam, le ciel n'écrase pas la terre: l'homme n'est pas ligoté de mille liens. La révélation laisse ouverts des espaces où la responsabilité du musulman peut et doit s'affirmer. Chacun de nous doit faire son examen de conscience.
A l'heure de la crise du comportement et de l'affaiblissement du lien social, rechercher des formes de solidarité et de cohabitation est un souci incontournable. La cohabitation entre citoyens est fondée sur bien plus
qu'une simple tolérance. Parfois, les aléas de l'Histoire ont compromis ces intentions et dénaturé ces références. La responsabilité en incombe aux hommes et non pas au Texte ni à son Messager.
La conduite du musulman, notamment durant le Ramadhan, au lieu de tomber dans des travers, devrait être façonnée par le concept de justice. L'insistance du Coran sur ce thème, son orientation constante, qui est de mettre l'accent sur la justice, sur l'équité, sur l'égalité, rendent les musulmans extrêmement sensibles à ces dimensions qui apparaissent comme premières dans les relations sociales.
Le caractère, l'esprit, le comportement des musulmans ne peuvent être que profondément marqués par l'impératif de justice. Un musulman n'est pleinement croyant que s'il applique la justice et l'équité. Etre un homme juste, voilà une donnée coranique d'une importance majeure. En droit, le monde de l'Islam est censé être le monde de la justice: Islam et justice sont théoriquement synonymes. La justice, selon le Coran, est participative de la piété: «La justice est proche de la piété.» Le Coran précise encore: «Dis: mon Seigneur prescrit l'équité», et encore: «Vous qui croyez, témoignez de l'équité: que la rancune contre un autre peuple ne vous vaille pas de tomber dans l'injustice. Soyez justes.»
Reste à mesurer la distance qui sépare ce principe de l'exercice de la justice dans la pratique quotidienne, et à rechercher les causes réelles des dérives. Le Coran s'adresse à l'humanité; la dernière Sourate répète cinq fois le concept d'humanité, les gens, les êtres. La Révélation vise les gens dans leur ensemble. Ce qui peut poser problème en ces temps modernes, c'est la question de la justice. Nous n'avons jamais à nous opposer à la différence, mais à l'injustice. Pour le Coran, chacun est responsable de ses actes. Personne ne peut se targuer de l'irresponsabilité ou de l'inconscience, même s'il y a une part de mystère ou d'inconnu dans tout rapport et prise de décision qui nous engage avec l'autre.
Pour la plupart des thèmes et questions, le Coran facilite la prise en compte de la variété des situations et permet, exige de réfléchir, de discerner, de s'adapter et d'évoluer. Ses prescriptions favorisent les conditions du vivre-ensemble juste, du changement et des métamorphoses et soutiennent l'humain pour distinguer le juste de l'injuste, le licite de l'illicite et d'assumer le civisme.

L'ijtihâd

Depuis trois siècles environ, les sociétés musulmanes troublées, paralysées par la marginalisation de la pensée, et du savoir, perturbées par des problèmes internes de développement et par la trajectoire problématique de l'Occident qui agresse et se mondialise, ont des difficultés à interpréter. La question de l'ijtihad est au centre des enjeux. Si on veut progresser, se développer, il faut raisonner, s'instruire et éduquer.
Toute vérité, y compris la Vérité révélée, est compréhensible si l'on raisonne, dans une trame où se nouent et se tissent le clair et le moins clair, l'évident et l'ambigu, entre les lignes aussi. Vérité que l'on ne peut pas asséner d'un bloc, mais la signifier progressivement. L'ijtihad est au coeur de la pensée. Il s'agit de s'ouvrir et de vérifier que la culture peut favoriser l'aptitude à responsabiliser, humaniser et innover. Il est primordial d'adapter l'ijtihad aux circonstances liées à la vie moderne. Pour ce faire, nous devons préciser le sens de l'ijtihâd contemporain.
Non pas celui qui s'accommode de l'époque, ou qui se plie aux exigences du matérialisme, et en vient à reconsidérer sa tradition pour l'appliquer coûte que coûte à la réalité variable, mais surtout celui qui respecte l'esprit humain. Il faut discerner les aspects positifs des aspects négatifs de chaque temps et réinventer une culture vivante et humaine. Il ne fait aucun doute que les hommes ne doivent pas tourner le dos au monde.
Force est de souligner que l'ijtihâd auquel tout être raisonnable aspire, n'est pas celui qui cherche à tourner le dos à son époque, ou au contraire à tout prix vouloir se conformer à son époque. Il y a du clair et de l'obscur dans toutes époques. Nous entendons plutôt par ijtihad, celui qui se veut créatif, fidèle et novateur en même temps.
Ni fermeture ni dilution. Un moujtahid est un rénovateur, un porte-parole savant des intérêts de son peuple et qui veille à la préservation scrupuleuse de ses racines, de ses intérêts et aspirations, et qui répond aux besoins culturels des gens, en leur balisant la voie vers l'avenir, une vie ouverte, équilibrée, responsable et digne. Pour l'Islam, contrairement aux discours des extrémistes, c'est non seulement possible, mais vital.
L'exégèse admise est fondée sur une connaissance suffisante des règles scientifiques, linguistiques, éthiques et fondamentales du savoir et des valeurs propres. Toute interprétation doit faciliter et non compliquer. Elle ne contredit pas une raison saine, ni bafoue une science certaine fermement établie.
Tout en faisant les efforts possibles de recherche et de réflexion, poussant à la déconstruction, la recherche de la vérité et de l'opinion juste, le détachement de soi, des passions et des préférences non étayées par des arguments.
Le savant, l'intellectuel, doit défendre l'intérêt général, s'appuyer sur la raison pour chercher le bien commun et ce, pour que nous puissions cerner notre époque, comprendre les problèmes, les questions qui y font jour et prendre conscience de ses risques et exigences. Cette démarche permet de nous pencher sur les nouveaux contextes pour les soumettre à l'analyse avec un esprit ouvert et perspicace.
La réflexion représente une version vigilante de l'humain qui a fait ses preuves. Reste à sortir des instrumentalisations et superficialités. L'ijtihâd, mot générique, désigne donc le principe de réflexion libre et responsable exigé aux intellectuels compétents afin qu'ils participent au travail de rénovation et d'invention de nouveaux concepts et de nouvelles pratiques, et d'interprétation du noble discours coranique et de la Sunna prophétique éclairante. Cet aspect fait de l'ijtihâd une possibilité ouverte à toute évolution et adaptée aux intérêts des individus et des sociétés, s'accommodant de tous les temps et de tous les lieux.

L'ijtihâd, ou tajdid, est cet acte du renouveau qui distingue entre les opportunités et les incertitudes, entre ce qui fait obstacle et ce qui permet le progrès. Il faut non seulement assumer les changements mais les susciter pour maîtriser l'époque, dans l'intérêt général de la société, afin de préserver son équilibre et sa stabilité et renforcer son attachement au sens de l'ouvert et de la civilisation.
L'ijtihad est efficace, utile et agissant sur la vie de la société islamique, s'il est pratiqué dans la transparence, le respect des valeurs communes, qu'il prenne en compte la mémoire commune et le respect de la dignité humaine. C'est cela ce qui est valable en tout temps et en tout lieu. Car l'Islam est venu édifier la communauté médiane, du juste milieu, équilibrer, en vue d'humaniser, de libérer et non point asservir l'humain, ou le déshumaniser. L'Algérie a, depuis des siècles, été une Terre de l'ijtihad. En éduquant et cultivant, nous préparons l'avenir. Jeûner c'est assumer avec vigilance et sagesse le vivre-ensemble juste face aux défis de l'heure.

Par Mustapha Cherif
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El Watan 1er septembre 2011
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