Amis du Diocèse du Sahara (ADS)
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ANNEXE AU BILLET MENSUEL AOUT 2010


Rania Boussaid


Du Frère Antoine, de Tamanrasset :

    A tous ceux qui l’avaient rencontrée pendant les années où elle assurait l’accueil dans le bordj de Ch de Foucauld, à ceux qui l’ont entendue à Tre Fontane la veille de la béatification, à ceux et celles de ses nombreux ami(e)s que je peux joindre par courriel, à ceux et celles qui ne la connaissaient pas mais savent les liens qui m’unissaient à elle, j’ai la douloureuse mission d’annoncer qu’elle nous a quittés  lundi 9, dans l’après midi, emportée par la crue de l’oued Outoul. Elle était dans la voiture d’un cousin avec Marie-Agnès et Béatrice qui eux ont réussi à s’en sortir. On vient de retrouver son corps après 40 h..
    Je suis incapable d’en dire plus ni sur les circonstances de sa mort, ni sur ce que va représenter son absence dans ma vie et dans celle de beaucoup de personnes ici et ailleurs.
    Elle venait d’avoir 32 ans, un contrat de travail renouvelé pour 15 mois. Elle était en pleine forme et avait des tas de projets en  cours de réalisation.
    Pour avoir des adresses que je n’avais pas, j’ai utilisé des envois collectifs faits par elle à certaines occasions. Donc ne vous étonnez pas de recevoir plusieurs fois ce message. Le dernier contenait un poème de Tagore qu’elle avait trouvé sur internet. Les mots de ce poème (ci-dessous) résonnent maintenant d’une manière nouvelle, donnant un sens à sa vie et à sa mort.  
    Et ce matin, une autre Parole nous est donnée : « Tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel » que je commentais récemment. Ce qui a existé de vraie communion dans nos vies, ne fût-ce que quelque temps, ne fût-ce qu’un moment, cela reste désormais définitivement inscrit dans l’éternité de Dieu. Les liens qui se sont noués entre elle et nous ne peuvent se défaire. « Les amitiés qui auront été bonnes dès cette vie se continueront éternellement en l’autre » disait François de Sales.

      Dans cette espérance qui n’enlève pas la douleur de la séparation, en pensant à sa maman, à ses sœurs et à toute sa famille, je vous suis uni de toute mon amitié, dans le souvenir de Rania


Antoine    
le 11août 2010



Le jardinier d'amour

Le même flux de vie
qui coule dans vos veines nuit et jour
court à travers l'univers                   
et danse en rythmes et mesures.

C'est la même vie qui perce,heureuse,
à travers la poussière de la terre
en d'innombrables brins d'herbes
et qui éclate en vagues tumultueuses
de feuilles et de fleurs.

C'est la même vie qui est bercée dans l'océan
en flux et reflux de naissance et de mort.

Vos membres, vous les sentez communiquer
avec cet univers de vie
et ils deviennent resplendissants.

Et ce qui fait votre fierté,
c'est ce battement de la vie des origines
qui danse en ce moment dans votre sang


Témoignage  donné par Rania Boussaid,
lors de la veillée  du 12 novembre 2005
 à l’Abbaye de Tre Fontane.



Née à Tamanrasset en 1978, Rania a assuré pendant cinq ans une permanence dans le Bordj de Charles de Foucauld.(Octobre 2003-Novembre 2007)
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                 Dans plusieurs occasions, j’avais entendu parler de Charles de Foucauld, sans que son nom m’impressionne ou que ma curiosité me pousse à demander qui c’est cet homme-là ? J’avais même recopié un texte en arabe d’une autre personne disant qu’il était un espion que les touaregs avaient condamné et tué. Jusqu’au jour où il m’a été proposé de travailler dans un lieu qu’on appelle « le Bordj de Charles de Foucauld ».

                 Pour que ma présence soit efficace, j’ai dû chercher pas mal d’informations concernant le lieu, les raisons et les circonstances de sa construction, ainsi que sur celui qui l’a construit. J’ai lu quelques livres, mais je ne comprenais pas grand-chose. Dans le même temps, j’ai entendu raconter son histoire plusieurs fois, devant moi. Je remarquais surtout la flamme dans les yeux de celui ou de celle qui parlait comme s’il voyait de l’intérieur ce que les autres ne voyaient pas et souhaitait le partager avec plaisir, sans ennui ni fatigue de raconter toujours la même chose.
 
                 Alors, j’ai commencé à avoir envie de connaître qui était ce Charles, non seulement pour progresser dans mon travail, mais aussi pour découvrir le secret de cet homme avec qui je passe le plus clair de mon temps, d’une façon ou d’une autre. Il n’a pas fallu longtemps pour que je reçoive la réponse. J’étais attirée par sa simplicité, sa manière d’aimer et de savoir vivre.

                 J’entendais souvent les visiteurs exprimer des impressions et des commentaires, j’assistais à des discussions et recevais leurs questions. Ils venaient de pays différents, des gens de toutes cultures, de tous niveaux, des jeunes et des vieux, de toutes les origines et de toutes les couleurs… J’étais étonnée de tout ce qui était en train de se dire autour de moi. Tous cherchaient à comprendre comment cet homme a réussi à vivre et à s’intégrer dans ce coin isolé du Sahara. J’entendais des gens s’exprimer avec des avis opposés, mais tous avec respect et admiration pour ce Charles.

                 Certains visiteurs m’ont demandé les raisons de ma présence dans ce lieu. Est-ce que c’était pour des études, pour Charles, ou pour le travail ? Qu’est-ce que je pense de lui ? Qu’est-ce qu’il représente pour moi … ? J’ai répondu aux questions, mais sûrement avec beaucoup de réserves. Cela m’obligeait à préciser mes pensées et à voir ce qui s’était passé au plus profond de moi-même. Quel mystère que tous ces événements et toutes ces rencontres ! Je me demande encore si en cherchant à comprendre les questions des visiteurs, je ne cherchais pas surtout à me comprendre moi-même.

                J’ai reconnu que je dois à cet homme une fière chandelle, parce que c’est grâce à lui que j’ai eu un boulot, qui n’est pas un simple boulot, mais un travail qui me permet d’être en contact avec des gens si différents par les cultures et les religions. C’était un vrai bonheur de découvrir tout ce qu’il y a de richesse unique dans chaque personne. Mais tout cela ne m’a pas été facile, car j’avais très peur de perdre mon identité et mes propres racines. Je croyais que j’étais à un carrefour de séparation. Mais il semble que je me suis trompée car ce carrefour était plutôt un point de rencontre et de rassemblement.


              Je me suis souvenue un peu de ce que j’avais lu au sujet de Charles, et c’est là où j’ai senti, comme s’il me parlait et me faisait savoir qu’il s’était trouvé lui-même très souvent dans des situations de carrefour à différents moments de sa vie et j’ai vu ce qu’il avait fait pour s’en sortir.

             Cela fait à peu près deux ans que j’apprends et découvre, à travers ce que ce Charles a vécu, ce que j’ai de riche et d’unique en moi, sans avoir perdu mon identité, ni mes racines, ni rien d’autre. Au contraire, je suis arrivée à comprendre beaucoup de choses qui m’aident aujourd’hui à suivre mon chemin avec confiance et sans avoir peur. Je me suis retrouvée dans ses écrits.

             Il répétait souvent que le changement et le renouvellement doivent commencer en nous. Il faut d’abord nous transformer au plus profond de nous-même pour pouvoir changer quelque chose dans la réalité du monde. Il faut que nos rêves deviennent réalité et ne restent pas des idées dans notre tête. Ceux qui ont fait le bien ne disparaissent pas, ils vivent pour l’éternité.


Rania Boussaid



délégation de Tamanrasset Tre Fontane 2005
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EN MÉMOIRE DE RANIA

Oued en cru au Hoggar

Trefontane : Rania dans la délégation de Tamanrasset
 et celle de la Fr.Gen des P.S.du  Sacré-Coeur,
de Rosny sous Bois 93110 -

rania_fichiers/ctamguide.jpg
extrait vidéo-sonre
en mp4, 8Mo1,30mn

Témoignage  donné par Rania Boussaid,
lors de la veillée  du 12 novembre 2005
 à l’Abbaye de Tre Fontane.


   
Rania à Tamanrasset
vue par elle même en 2007



p 9-11 Témoignage de Rania  traduit en Anglais (sous format PDF)
actes des cérémonies de Béatification de Charles de Foucauld


dans le désert du Hoggar, une touriste porte la lune à l'index



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