Amis du Diocèse du Sahara
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mise à  jour du 22 janvier 2017

Une HOMELIE de l'abbé Pierre à Saint-Saëns en 1981 ...
(F. 76 680)
toujours d'actualité un quart de siècle plus tard .....
 
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 L' abbé Pierre & ( à g) François de Laboulaye,(+1996), ambassadeur de France, maire de St Saëns,
ami de Mgr Mercier et  président des Amis de Louis Massignon,
installant une communauté temporaire de chiffonniers à St Saëns en août 1964  (cliché CF)

Mgr Michel Gagnon (évêque du sahara +2004), l'abbé Pierre ont tous deux célébré la messe en l'église de Saint-Saëns
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15 ans après l'abbé Pierre
, Mgr Michel Gagnon, évêque du Sahara,

à l'issue d'une messe célébrée en l'église de Saint-Saëns
***
Saint-Saëns, gros bourg du Pays de Bray en Seine Maritime, se trouve à 10 kms d’Esteville : l’abbé Pierre aimait s’y rendre lorsqu’il séjournait à la Halte d’Emmaüs.

   C’est ainsi que , à l’invitation de l’abbé Mius, curé de la paroisse, il est venu donner l’homélie, le dimanche 15 novembre 1981, pour la fête patronale du bourg.

   Le texte de son homélie, reproduit ci-dessous, est présenté " brut de coffrage ", c’est-à-dire sans aucune correction de style, ni aucune modification susceptible de l’altérer ou de la dénaturer. Il a paru bon en effet de lui conserver le rythme et le phrasé d’une parole qui se développe comme une méditation à coeur ouvert, se déroulant à la manière d’un poème de Péguy.

   Homme d’action – son œuvre est là pour le montrer – l’abbé Pierre se révèle comme un grand mystique et il nous dévoile la source qui nourrit sa force, son énergie, sa foi. Son homélie, davantage qu’un entretien, est une prière ; une prière non pas avec de grands mots mais tissée de paroles simples, intelligibles par tous, émaillée d’images et de comparaisons qui aident à mieux saisir la pensée qu’il souhaite communiquer.

    Ce qui confère à cette homélie du 15 novembre 1981, toute sa profondeur, c’est qu’elle a conservé intensément son actualité, qu’elle n’a absolument pas vieilli, un quart de siècle après avoir été donnée. Pour s’en convaincre, écoutons et méditons ce qui est dit, de la crise économique, de la nécessité du partage, de la foi, de l’amour ; retenons son insistance près des jeunes, pour qu’ils prennent conscience du rôle qu’ils ont à jouer.

   Certes l’homélie prononcée à Saint-Saëns est l’une des innombrables que l’abbé Pierre a données ; mais aujourd’hui, à quelques jours de son décès, il paru souhaitable de raviver l’actualité de son contenu, et d’en faire bénéficier le plus grand nombre, au lieu de le limiter à quelques privilégiés qui en ont conservé le souvenir.

  Ne serait-ce pas ainsi le moyen , de rendre plus insistantes et plus présentes que jamais, la consigne et l’exhortation de l’abbé Pierre à " n’être pas seulement des croyants, mais de ceux qui rendent croyable que c’est vrai : l’Eternel est amour, puisque nous, ses amis, nous vivons pour essayer d’aimer " ?


Claude Fournier , Saint-Saëns  10 février 2007 (**)

(**) Présentant  l' un de ses 5 ouvrages, Claude Fournier, (ici avec son frère Christian), est  historien local , journaliste honoraire .

Ici, à la cité St Pierre à Lourdes:  Claude et son épouse Marie Jeanne ont aussi participé à la création de l’ADS ( Amis du Diocèse du Sahara) avec Mgr Michel Gagnon, évêque du Sahara (+2004) qui venait très souvent à St-Saëns, quand il était en poste à Djibouti, à Rome ou au Sahara ; il y célébra  la semaine sainte en 1987. L'ADS  remercie Claude pour l'homélie de l'Abbé Pierre qu'il avait conservée et qu'il a bien voulu lui communiquer.
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HOMELIE DONNEE LE 15 NOVEMBRE 1981 PAR L’ABBE PIERRE
pour la fête patronale de Saint-Saëns. (F. 76 680)



  D’abord mes frères, je veux vous dire une confidence : c’est une joie très grande pour moi, à la fois d’avoir vu la beauté de votre église, la beauté de vos chants et la beauté de votre liturgie. Vous  tous, les enfants qui êtes là nombreux, c’est important, il est sage, il est normal  que la liturgie, la recherche de symboles pour exprimer ce que les mots ne peuvent pas suffire à dire, pour exprimer communautairement tous ensemble un grand amour, une grande espérance, c’est normal que ces symboles s’adaptent pour être compréhensibles, pour véritablement parler, c’est une joie, je vous le dis, très profonde dans mon cœur, de voir la beauté avec laquelle, vous assemblant ainsi, vous chantez la gloire de Dieu.

  Mais ce à quoi nous allons réfléchir ensemble, ce matin pendant un petit peu de temps, ce sont des réalités, des réalités sur lesquelles il ne faut pas nous faire d’illusions, des réalités graves qui demandent du courage mais le courage qui conduit vers la joie.

  Il y a un instant vous avez répété et vous l’avez, selon votre âge, combien de centaines et de milliers de fois, répété déjà et peut-être sans jamais en avoir complètement mesuré la force et la provocation, vous avez répété dans le chant du Gloria la plus belle parole d’amour qui puisse exister, vous avez dit une fois encore :  " Père nous te rendons grâce, nous te disons merci " merci de quoi ? Merci pour quelque cadeau que nous aurions reçu ? c’est bien plus beau c’est la plus prodigieuse parole d’amour qui puisse exister : Père nous te disons merci pour ton immense gloire. C’est un petit peu comme serait un petit enfant qui saute au cou de sa maman dans un mouvement de tendresse débordante pour lui dire " merci maman parce que tu es toi " ! Merci mon Dieu pour ton immense gloire.

  Oh mes frères, mes sœurs, nous sommes prodigieusement privilégiés mais aussi tellement gravement responsables de par ce privilège, ce privilège que nous n’avons pas mérité, qui est un mystérieux don de Dieu, le privilège de croire, la foi, nous avons, petit nombre minuscule dans la multitude de l’humanité, connu la plénitude de la Révélation. Oh n’en connaissent la révélation pas seulement comme nous l’avons parfois orgueilleusement pensé, pas seulement ceux qui ont eu connaissance de la Bible, de l’Ancien Testament puis du Nouveau, de l’Incarnation, de la personne de Jésus, de ses actes, de ses paroles. Oh non, la révélation elle est bien plus vaste que ça : dès l’instant où a existé une véritable personne humaine, c’est-à-dire un être qui n’était plus seulement une chose qui possédait  un mouvement de liberté, c’est-à-dire de possibilité soit de n’aimer que soi-même, idolâtre de son moi, soit car c’est là la liberté qui fait que l’homme est tout autre que n’importe quelle chose, soit la possibilité d’aimer, d’aimer c’est-à-dire quand tu souffres toi l’autre j’ai mal et je ne me contente pas de pleurnicher mais parce que j’aime et j’ai mal de ton mal, toutes mes forces se lèvent pour nous guérir ensemble de ton mal qui est devenu le mien.

  Dès l’instant où il y a eu un commencement de liberté, le premier être " homme ", la révélation a commencé, l’Esprit Saint n’a pas attendu, ce souffle du Père et, du Père et du Fils dans l’Eternel  s’aimant, ce débordement d’amour produisant ce que par des mots symboliques nous appelons l’Esprit, littéralement l’Esprit c’est le vent, le souffle, comme du baiser de deux personnes qui s’aiment, les mystiques n’ont pas hésité à exprimer ainsi ce que veut dire l’Esprit Saint, ce souffle a parlé au fond de tout être humain, au fond de son cœur sans jamais le contraindre pour lui dire " si tu veux tu peux, pendant ce petit peu de temps qu’est la vie, ce petit peu de temps qui t’est offert, tu peux si tu veux, rien ne t’y contraindra, tu peux apprendre à aimer, à aimer pour le toujours de l’au-delà du temps ".

  Cette révélation, elle est à travers toute l’humanité ; mais nous, nous avons ce fantastique privilège d’avoir par la connaissance de l’incarnation, de l’humanité que l’Eternel Amour a voulu prendre, pour être comme nous , dans nos joies et dans nos larmes, pour être comme nous et souffrant jusqu’à en mourir dans les horreurs de la Passion, souffrant par la conséquence de toutes les trahisons, de tous les refus d’aimer, des êtres libres,  des hommes auxquels l’Eternel donnant la liberté, avait donné la destinée,  la vocation de répondre à son amour.

  Mes frères, vous le savez bien, nous qui avons le privilège d’avoir la certitude que l’Eternel est Amour, nous qui sommes les croyants, les seuls croyants qui méritent le respect, ne soyez jamais d’autres que ceux-là, non pas le croyant tout court, le croyant les yeux fermés, nous qui avons ce privilège, si nous sommes de vrais croyants et de vrais hommes, nous qui avons ce privilège d’être des croyants quand même, c’est-à-dire des êtres humains blessés devant la connaissance que désormais ces techniques modernes nous imposent la connaissance de la réalité de l’univers entier, nous qui ne pouvons pas ne pas être blessés autant que n’importe quel homme, en connaissant l’accumulation innombrable des victimes, des innocents broyés exploités, injustement traités ou tout simplement négligés, oubliés par les privilégiés ou par ceux qui ont quelque pouvoir , nous qui blessés comme tous les autres hommes, par tant de douleurs,  mais nous qui avons le privilège d’être certains quand même, que l’Eternel est Amour, malgré tout ce qui semble nier son amour, vous le savez bien quand nous chantons dans notre foi " Gloire à Dieu ", nous entendons autour de nous, tous les jours, de nos frères et de nos sœurs, très bons, affamés de bien, de justice, de vérité, quand nous chantons gloire à Dieu dans notre foi, nous entendons ces frères et sœurs sincères nous dire " Tais-toi ".
 
  Il y a toujours eu des orgueilleux, ceux qu’on appelait les esprits forts, les crâneurs, pour refuser Dieu, ne pouvant pas supporter de se voir dépendants, créatures, comme serait un enfant qui n’accepterait pas d’être après son père et sa mère, il y a toujours eu de ceux-là.

Mais vous savez bien que c’est autre chose aujourd’hui. Parmi les innombrables de nos frères et sœurs, très bons, très sincères qui nous disent " Tais-toi ! ", il y a parmi les meilleurs, et ils nous disent " Tais-toi " parce qu’ils nous disent  " comment peux-tu, maintenant que toi comme nous tu connais tous les malheurs du monde, les horreurs, comment peux-tu encore dire et chanter gloire à Dieu ".

  Mon ami le romancier Albert Camus me confiait jusqu’à ses derniers jours " jamais je ne pourrai accepter un Eternel créateur d’un monde dans lequel  pleurent tant de petits enfants innocents " Ils sont sincères, ils nous disent " dire gloire à Dieu pour la beauté des étoiles qu’est-ce que tu veux que ça me fasse ? " " Bien sûr c’est beau les étoiles, mais il y a trop de larmes d’innocents ; toutes ces larmes éteignent le beauté des étoiles ", ils insultent la gloire de Dieu et ils nous disent dans leur sincérité :  Comment pourrais-je dire "  Notre Père " ? ils nous disent dans leur sincérité " quel est le père qui verrait tant souffrir dans le monde, qui verrait tant souffrir ses enfants, qui serait tout-puissant, et qui apparemment serait indifférent ? "

  Le croyant, croyant quand même, nous les privilégiés de la foi, nous sommes dans le monde aujourd’hui petit nombre, comme un enfant qui verrait son père accusé, comme un enfant qui verrait ses frères et sœurs répondre, scandalisés par le père incompréhensible. Un jour il y a déjà longtemps, on m’a appelé dans un pays scandinave, dans l’université d’Upsala en Suède, parce qu’il y avait une épidémie de suicides d’étudiants. Et un garçon, très intelligent, très bon, très loyal, dans la confidence m’a dit " Père, maintenant que j’ai pu faire tant d’études, que je connais tant la réalité du monde entier, pour moi m’a-t-il dit Dieu c’est le tout-puissant incapable, et l’homme n’est rien ". Pendant des années, j’ai porté en moi comme une blessure, la confidence sincère, cet horrible blasphème, et qui n’était rien d’autre que l’écho du désespoir, et puis un jour, mes frères, dans la vie qui est la mienne, qui me fait tantôt travailler avec les plus grands de la terre et vivre avec les plus pauvres, un jour j’ai compris que la vérité, dont nous sommes les porteurs, que nous avons la tragique responsabilité de faire voir, n’étant pas seulement des croyants mais des croyables, j’ai compris que la réalité, la vérité elle n’est pas que le Tout-Puissant, à l’image de ce qu’est un homme puissant, serait un dominateur ; la réalité qui nous a été révélée c’est que l’Eternel parce qu’il est Amour, est tout-puissant, oui, mais tout-puissant prisonnier.

  Qu’est-ce que c’est l’Amour ? c’est n’avoir plus qu’un but : entendre l’autre que j’aime, répondre à son tour moi aussi je t’aime, et celui qui aime le premier, la fille ou le garçon qui aime, qui ne vit plus que pour entendre l’autre lui répondre moi aussi je t’aime, à partir de l’instant où ils s’aiment, est-ce qu’ils ne savent pas qu’ils sont prisonniers de la liberté de l’autre, qui est l’unique valeur réelle de l’autre, est-ce celui qui aime le premier ne sait pas que, si stupide, il terrorisait l’autre, et n’obtenait pas la réponse : moi aussi je t’aime, que d’une personne qui tremblerait, qui aurait peur, est-ce qu’il ne sait pas qu’il aurait détruit toute valeur de ce qui était devenu pour lui : tout. L’amour rend prisonnier, l’Eternel a risqué sa gloire en créant des êtres libres, pour que soit possible une réponse d’amour  à son amour.

  L’Eternel aurait pu faire un monde dans lequel il n’y aurait jamais aucun être, quelque automate, pour quoi faire ? Est-ce que l’Eternel aurait besoin de jouer pour s’amuser ? Si l’Eternel existe, il est amour : s’il est amour, il ne peut rien faire qui ne culmine, qui ne se termine dans des capacités d’aimer, dans des libertés.

  Nous avons à révéler au monde qu’on l’a trompé, pas seulement lorsqu’on a brisé des libertés, en emprisonnant injustement des victimes. On a trompé le monde, et notre partie du monde, gravement, depuis l’époque où l’on a commencé à crier " la liberté, voyez comme elle est belle ! " Et à prétendre qu’elle était un but. " Etre libre,  pour être libre ", c’est la définition même de Satan ! Ce n’est  pas vrai que la liberté est un but, elle est le moyen !  image de Dieu en nous, le moyen sacré qui nous rend capable d’aimer : " Si tu veux, sans que tu y sois contraint, avoir mal avec celui qui a mal,  vouloir ta joie dans sa joie, sa joie dans la tienne et par contagion, l’entraînant à la certitude, la foi ; la certitude que le temps nous conduit vers la réponse à notre faim et soif d’être capable d’aimer, d’être aimé ".

  Oh mes frères, c’est ça notre responsabilité, de crier au monde que l’homme a été trompé. Lorsque dans un livre que vous pourrez  trouver à la sortie de l’église, j’ai voulu qu’on lui mette en sous-titre " venger l’homme ", venger Dieu en aimant, c’était pour faire prendre conscience de cela : l’homme a été trompé,  Dieu a été bafoué lorsqu’on l’a présenté parce que puissant comme dominateur. Il est le puissant prisonnier, captif, et qui nous crie " moi seul, j’ai tant respecté l’homme, que j’ai risqué ma gloire et que je suis venu par le seul  moyen : partager sa condition jusqu’à mourir de ses refus d’aimer".  Et j’entends le Seigneur me dire : " des hommes m’insultent en me disant où est ta miséricorde ? " mais il me dit du haut de la croix, ses mains prisonnières, ses mains clouées, montrant le tout-puissant, captif volontaire, il nous crie " mais ma miséricorde ne peut venir dans ce monde qu’à travers ta miséricorde ". Devient miséricordieux le cœur qui  partage la misère de l’autre. Alors, à travers ta miséricorde, la mienne pourra ruisseler à travers le monde et le transformer.
  Oh !vous tous, et vous surtout les jeunes, les filles et les garçons, qui entrez dans la vie : soyez dans la joie, votre vie sera dure, la nôtre aussi elle a été dure, votre vie sera dure, et pourtant je vous le crie, vous qui êtes jeunes, qui commencez votre vie, dans un temps où Dieu merci, se trouve renversée, brisée, une idole dont même nous les croyants, les pratiquants, nous avions été si souvent les victimes, cette idole qu’on appelait la croissance, avoir plus, toujours plus, toujours plus pour quoi, quoi, quoi, ma réussite, ma carrière, cette société là, c’est une grande illusion de penser qu’elle traverse seulement une brève crise, et que, par miracle de changement politique, quelque événement, tout d’un coup, ça s’arrêtera, c’est pas vrai, ce qu’on appelle la crise, l’arrêt de l’enrichissement pour les plus riches, il y en a pour longtemps avant que cela ait disparu. Vous entrez dans un temps où nous serons tous obligés, ou bien ce sera la révolte, toutes les formes de conflits et de carnage, et d’autres destructions du monde. Nous entrons, vous commencez votre vie, dans un temps où Dieu merci,  nous n’aurons pas d’autre choix que de chercher avec intelligence, comment faire d’autres partages : partage du temps de travail, partage du revenu du travail, création de nouvelles occupations, qui seront créatrices d’art, d’artisanat, et en même temps, renaissance d’adoration.

  Malheur à nous, si continue la multiplication des sectes, jusqu’à la drogue, où s’enfuient des filles et des garçons, parce qu’ils ne croient plus dans la vie, parce qu’ils ne croient plus dans une valeur de liberté qui serait sa propre fin et qui désespèrent, et c’est notre responsabilité à nous qui avons reçu la plénitude de la révélation de l’Eternel Amour, qui est tant amour qu’il se fait notre captif, c’est notre responsabilité de rendre tout cela croyable. Lorsque nous arriverons, et pour moi je suis plus près de cette heure que du commencement de ma vie, lorsque pour chacun de nous, nous arriverons à l’heure de la fin du temps,  de la fin de l’ombre, de la plénitude de la lumière, ce qu’on appelle le jugement, pour ceux que l’on dit damnés, cela ne signifiera en aucune façon quelque vengeance de Dieu, c’est bien plus grave que cela, la plénitude de la lumière soudain se faisant, nous nous verrons tels que nous nous serons faits pendant le temps de notre vie.  Nous nous découvrirons ou bien stupides, suffisants, ayant voulu quoi quoi quoi ? ma réussite, mes proches, les autres je m’en fiche ; et nous entendrons l’Eternel nous dire : tu as prétendu te suffire, suffis-toi. Comme devoir à perpétuité se regarder dans la glace, tout seul. La damnation, le mot damné veut dire sécateur : qui coupe la branche ; ce n’est pas l’Eternel qui par châtiment le fera : c’est nous qui l’aurons fait  pendant le temps de notre responsabilité. Ou bien à l’heure de la lumière, nous nous verrons, malgré tous nos péchés, nous nous verrons ayant cherché à être communiants, tu as mal – j’ai mal, et ensemble on va chercher à retrouver la joie, ensemble. Alors l’Eternel pourra dire : " Viens, tu es mon enfant ".

  Je termine en disant quelque chose à quoi j’ai souvent pensé : il est de tradition dans la foi chrétienne que la vierge Marie est l’avocate des pécheurs. Oh oui, c’est vrai, nous sommes tous pécheurs, nous avons besoin de compter sur la tendresse d’une maman pour que nous soient pardonnés nos péchés. Mais la Vierge Marie parce qu’elle est maman, elle peut être l’avocate de tout péché, sauf d’un : l’Evangile nous a avertis : tout péché peut être pardonné, sauf un, le péché contre l’Esprit, contre l’Esprit qui est amour. La Vierge Marie elle est comme une maman de famille nombreuse qui aurait été pour un temps obligée de s’éloigner, et qui aurait dit à ses grands, à ses aînés de ses filles et de ses garçons : pendant que je ne serai pas là, soyez sages, travaillez bien, mais surtout, surtout, occupez vous du tout petit, qui peut pas tout seul, tout petit.

  Quand la Vierge Marie, la maman est de retour, si elle voit que ses grands, sans doute, ont été peut-être très sages, sans doute ont été peut-être très travailleurs, mais insensés, ont laissé dépérir, abandonné, peut-être mourir le tout petit, comment alors, parce qu’elle est maman, comment pourrait-elle, devant la colère du père, faire autre chose que rester muette.

  Oh mes frères, remercions Dieu, de ce qu’il y ait des vocations, sous des formes très diverses, de toutes sortes de nouvelles, parfois vocations de couples ou de familles entières, vocations, qui beaucoup plus  qu’on ne le croit, ressurgissent pour le service de la mission : réjouissons-nous en, entraidons-nous afin que chacun à notre place, dans notre vocation, dans notre profession, nous ne trahissions pas notre mission. Allons, accomplissons notre mission, que l’humanité tout entière attend, de n’être pas seulement des croyants, mais de ceux qui rendent croyable pour tous, que c’est vrai, que l’Eternel est Amour, puisque nous, ses amis, nous vivons pour essayer d’aimer.


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 le "carré " des compagnons d'Emmaüs : la dépouille de Mlle Lucie COUTAZ, co-fondatrice d'Emmaüs repose sous le bras droit du Christ, celle de "l'abbé" sous le bras gauche.. actuellement recouverte de fleurs (Pâques 2007), celle de Georges LEGAY, premier chiffonnier d'Emmaüs, sous la grande croix en bois, au fond à droite.

Plus de 4 000 "pélerins" au week end de Pâques;  plus d'un millier de personnes en semaine ordinaire... Près de 100 00 visiteurs depuis 10 ans (janvier 2017)

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In la croix
  Si la tombe de celui qui se voulait toujours en mouvement n’attire plus autant, le lieu de mémoire récemment aménagé dans les bâtiments d’Emmaüs absorbe le gros du trafic à Esteville – 7 500 visiteurs chaque année. Un lieu de mémoire laïc, à l’image de celui qui écrivait : « Le partage de l’humanité ne se fait pas entre croyants et non-croyants, mais entre les idolâtres de soi et les communiants. »

Samuel Lieven, le 20/01/2017

http://www.la-croix.com/

Dans le village normand où l’abbé Pierre se retirait pour méditer et travailler, sa tombe attire moins de monde que le centre dédié à sa mémoire et son action.


C’est un Christ de bronze grandeur nature, couché sur le gravier au fond du cimetière. L’abbé Pierre l’avait un jour repéré dans une décharge et des compagnons d’Emmaüs l’ont aussitôt chargé avec un tracteur pour le restaurer. L’insurgé de la bonté repose sous le bras gauche, à côté de Lucie Coutaz, sa fidèle secrétaire, et des autres compagnons dont les plaques indiquent, pour chacun, l’année de leur arrivée à Emmaüs – une nouvelle naissance.

Un lieu à destination des pèlerins

« J’ai toujours su que l’abbé Pierre serait enterré ici, en toute simplicité comme il l’avait demandé », se souvient Vincent Léger, 45 ans, agriculteur à Esteville. L’homme, qui a grandi dans une maison mitoyenne de la communauté d’Emmaüs, se souvient de la foule prenant d’assaut le petit cimetière juste après la mort de l’abbé. « C’était devenu un vrai champ de labour, il a fallu ramener du gravier ! » Devant la ruée, la commune aménage alors un vaste parking.

> À RELIRE : « L’Abbé Pierre », une marque déposée à faire vivre

Mais, depuis, le calme est revenu dans le bourg où l’abbé et ses compagnons s’étaient installés dans les années 1960, à la faveur d’un don immobilier. À la belle saison, des groupes scolaires et des visiteurs de passage se recueillent un moment devant sa plaque où l’on lit : « Il a essayé d’aimer. »

Des paroissiens motivés ont d’abord cherché à organiser un accueil sur place. « Comme l’abbé Pierre était prêtre, nous voulions aménager un lieu à destination des pèlerins, explique Marie-Thérèse, catéchiste, venue ce dimanche préparer la messe anniversaire, dans l’église, avec une trentaine de choristes. Finalement, nous sommes trop peu et, avec les années, son témoignage n’atteint plus autant les consciences. » Le P. Arthur Hervet, assomptionniste engagé auprès des Roms dans la région lilloise, fait encore le voyage chaque mois pour entretenir une petite flamme spirituelle autour du curé des sans-logis.

Toujours en mouvement

Si la tombe de celui qui se voulait toujours en mouvement n’attire plus autant, le lieu de mémoire récemment aménagé dans les bâtiments d’Emmaüs absorbe le gros du trafic à Esteville – 7 500 visiteurs chaque année. Un lieu de mémoire laïc, à l’image de celui qui écrivait : « Le partage de l’humanité ne se fait pas entre croyants et non-croyants, mais entre les idolâtres de soi et les communiants. »

Le livre d’or, accessible au milieu d’une grande bibliothèque à l’entrée du site, en témoigne en français, anglais, portugais, arabe… « Abbé Pierre, tu nous manques, le monde a besoin d’hommes humains comme vous. » Photos, citations, interviews télévisées… Ici, tout est fait pour maintenir le plus vivant possible un héritage que tout le monde peut s’approprier. « Ceux qui restent le plus longtemps et ressortent le plus marqués sont souvent engagés dans des actions de solidarité, souligne Philippe Dupont, directeur du centre. Il y a aussi ceux dont l’abbé Pierre a concrètement marqué la vie lors d’une rencontre ou qu’Emmaüs les a dépannés. »

> DIAPORAMA : L’abbé Pierre, une vie en images


Sous le préau, une galerie de portraits pose des visages sur les plaques aperçues au cimetière. Parmi eux, Georges Legay, le premier compagnon, qui, après une tentative de suicide, a rencontré l’abbé en 1949. « Je ne peux rien te donner, je n’ai que des dettes, je suis fatigué, lui dit ce dernier. Mais toi, puisque tu veux te suicider, tu n’as rien à faire de ta vie : si au lieu de te tuer, tu venais me donner un coup de main… » Cinq ans plus tard, l’insurrection de la bonté retentit sur les ondes de RTL.

À l’étage, dans sa petite chambre peinte en bleu et jaune où il a tant reçu, des naufragés de la vie au chef de l’État, on découvre un autre abbé Pierre : solitaire, lecteur, travailleur, mais surtout homme de prière, marqué par la spiritualité du désert. « Quand on se retrouve seul dans sa chambre le soir, seul devant sa glace, seul face à soi-même, on se sent las d’être si faible. »

Samuel Lieven
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voir aussi sur le site de l'Eglise catholique d'Algérie
 la page in " zoom "

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l'Abbé Pierre sur le plateau du Hoggar à l' Assekrem en 1992

mise à  jour du 22 janvier 2017
autre page sur l' Abbé Pierre (1er anniversaire de sa mort)
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