Le
4 Février 2016 sur Radio Vatican Entretien : Mgr Claude Rault est un père blanc, évêque de Laghouat en Algérie depuis 2004. Ce diocèse de plus de 2 millions de Km2 est l'un des plus grands du monde. Dans le désert du Sahara, il se sent chez lui. Désert, ma cathédrale, c’est d’ailleurs le titre d’un livre qu’il a publié en 2008, aux éditions Desclée de Brouwer. Quand il se déplace en Europe, et qu’il donne des conférences, Mgr Rault fait salle comble et captive le public. Témoin d’une Église minoritaire, servante et pauvre, cet évêque missionnaire et nomade, prêche la rencontre avec le monde musulman, même s’il regrette avec douleur les violences qui secouent cette région du monde. Cecilia Seppia, du service italien de Radio Vatican, l’a rencontré lors de son passage à Rome. |
Pour plus sur "Désert, ma cathédrale" Les CHAPITRES de " Désert, ma cathédrale" Pour les fidèles lecteurs du Site ADS, quelques extraits de l'ouvrage... |
In "les
essentiels de la Vie", le Père Denys Pillet, plus de 60
ans au Diocèse du Sahara, vous propose
Témoignage de Soeur Carol : "Pour l'amour de l'Islam" |
Suite aux
articles de la Rédaction ADS en janvier 2016 , " Non, la laïcité ne peut pas être islamophobe &" Cologne : Viols, racisme, xénophobie et islamophobiesur la laïcité," un de nos lecteurs, J.R, complète par deux articles , « Gare aux laïcards
extrémistes »
par Jean
BAUBEROT LE MONDE | 20.01.2016 à 20h12 • Mis à
jour le 21.01.2016 àUne violente mise en cause de l’Observatoire de la laïcité s’effectue depuis quelques jours. Elle a franchi un nouveau palier avec Manuel Valls, prétendant que cet organisme n’avait pas le droit de signer un appel contre Daech [acronyme arabe de l’organisation Etat islamique], comportant certains signataires qui déplaisent au premier ministre. Il ne s’agit en rien d’un conflit entre partisans d’une « laïcité molle » et d’une « laïcité dure ». A ceux qui en douteraient, la vigoureuse défense de l’Observatoire par la Fédération nationale de la Libre-Pensée le prouve. La Libre-Pensée critique certaines positions prises par l’Observatoire. Mais elle estime cela « normal dans un débat démocratique ». Elle trouve, en revanche, « inacceptables » les attaques contre cet organisme et dénonce les « conceptions liberticides » d’« Inquisiteurs d’un temps nouveau ». La loi de 1905, “ loi de liberté ” selon Aristide Briand, constitue une rupture avec le gallicanisme En fait, la polémique actuelle s’enracine dans une controverse ancienne. C’est Jacques Chirac qui décida de créer un Observatoire de la laïcité, mais celui-ci ne vit pas le jour et deux organismes représentèrent des conceptions divergentes de la laïcité : d’un côté la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), qui veilla à ce que la loi de 2004 interdisant les signes ostensibles à l’école publique ne déborde pas son objet ; de l’autre, le Haut Conseil à l’intégration (HCI), dont l’historique de la laïcité (2007) comporte onze erreurs, souvent grossières, qui ne s’expliquent que par sa volonté de relier étroitement laïcité et gallicanisme, politique séculaire des rois de France. Celui-ci contrôle la religion, réprime celle qu’il estime mauvaise, protège celle qu’il considère comme bonne. Remise sur des rails non discriminatoires Avec Nicolas Sarkozy, la Halde fut normalisée puis supprimée, le HCI devint le conseiller du prince. Il continua à énoncer des contre-vérités. Ainsi, il prétendit que la loi de séparation des Eglises et de l’Etat (1905) comporte un « vide juridique » concernant les manifestations religieuses dans l’espace public, alors qu’il s’est agi d’un choix : les parlementaires ont refusé les amendements qui les limitaient. D’une manière générale, comme l’a montré l’historien Emile Poulat, la loi de 1905, « loi de liberté » selon Aristide Briand, constitue une rupture avec le gallicanisme. Cependant, un courant gallican a continué à exister dans le camp laïque. Avec François Hollande, l’Observatoire de la laïcité fut véritablement créé et le HCI supprimé. Cependant, l’ex-HCI publia, à l’été 2013, un avis. Il voulait étendre l’interdiction des signes religieux ostensibles à l’enseignement supérieur, faisant peu de cas des franchises universitaires. Cet avis montre que, dès la création de l’Observatoire, certains souhaitent le parasiter. Or, le remplacement du HCI par l’Observatoire a une signification très claire, celle de considérer la laïcité comme s’appliquant à tous. Même s’il avait été moins ignare, le HCI symbolisait la réduction de la laïcité aux « problèmes » de l’immigration, en lien avec l’instauration d’un ministère de l’identité nationale. Ainsi, il aurait été incongru que le HCI se saisisse de la question du droit spécifique de l’Alsace-Moselle, ce qu’a fait l’Observatoire. Il faut donc rendre cette justice à François Hollande : il a remis la laïcité sur des rails non discriminatoires. Apologie de l’obscurantisme Depuis longtemps donc, des personnes, qui se prétendent partisans de la loi de séparation, mais sont en fait des gallicans républicains, rongent leur frein, n’ont jamais véritablement accepté la légitimité de l’Observatoire. Un tweet pointant les raccourcis d’Elisabeth Badinter posté par le rapporteur de l’Observatoire de la laïcité sur son compte personnel a déclenché l’hallali. Si on examine un peu froidement les choses, la situation devrait paraître ridicule : la liberté d’expression serait quasi absolue quand il s’agit de Charlie Hebdo et autres, critiquer Mme Badinter reviendrait à blasphémer contre la République ! Mais quand il s’agit de laïcité, certains deviennent fondamentalistes et défendent le premier degré contre toute démarche de connaissance. La position que vient de prendre Manuel Valls face à l’Observatoire est dans la logique de celle où, refusant toute démarche de sciences humaines et sociales, il s’est récemment livré, sans doute à son insu, à une apologie de l’obscurantisme. Là est l’enjeu premier de cette disputatio. Certains, au nom de convictions laïques prétendues, s’autorisent à récuser tout savoir sur la laïcité. Les avis de l’Observatoire reposent pourtant sur une analyse minutieuse de la loi de 1905, et la double rupture qu’elle a représentée : face à toute officialité de la religion, face au gallicanisme que mettait en œuvre Emile Combes. Alors bien sûr, de la connaissance à la prise de position, il y a toujours un écart et donc un espace pour la discussion. Mais nous avons, plus que jamais, besoin de cette laïcité qui, en 1905, dans une situation de quasi-guerre civile, a permis un rapide apaisement. Pour une laïcité rassembleuse Nous avons besoin d’une laïcité rassembleuse face à l’extrémisme de Daech. Or, face à l’importante augmentation d’actes antimusulmans, vouloir mettre ceux qui sont engagés dans le combat contre la haine anti-islam, quels que soient les désaccords que l’on peut avoir aveceux, hors du pacte républicain constitue une faute énorme, un acte totalement contre-productifdont le premier ministre sera comptable devant l’Histoire. C’est également un très mauvais service rendu aux Français juifs, dont la situation douloureuse actuelle mérite une amitié plus intelligente. D’abord parce que prôner une laïcité dite « intransigeante » (pour reprendre une expression de Valls) qui, contrairement à 1905, ne limite pas la neutralité religieuse à la puissance publique, atteint forcément les juifs. Ainsila terrible agression de Marseille contre un enseignant juif le 11 janvier s’est-elletransformée, dans certains médias, en débat sur le droit de porter la kippa dans l’espacepublic. Quelle perversion ! Ensuite, parce que le meilleur, et le seul juste moyen decombattre l’antisémitisme est de lutter contre toutes les haines, et non de tenir des discours déséquilibrés. Briand demandait une « laïcité de sang-froid », cette exigence est toujoursd’actualité. Jean Baubérot, spécialiste de la laïcité, est l’ancien titulaire de la chaire « Histoire et sociologie de la laïcité » à l’Ecole pratique des hautes études. Il est notamment l’auteur de Les Sept Laïcit |
Rennes
janvier
2016.Comité laïcité Radicalisation : quelles possibilités d’action au niveau local ? L’action d’Etat est évidemment indispensable. Les débats nationaux ont leur intérêt et leur importance mais sur cette question de la radicalisation on peut en ce moment se sentir noyés par le flot des informations et des prises de position et se démobiliser. Je souhaite témoigner modestement comment l’action en proximité, reliée aux grands enjeux ne supprime pas les difficultés mais permet de repérer des marges de manœuvre pratiques et d’avancer. L’évolution positive du travail de notre comité me semble-t-il aide à prendre ici le risque d’une parole personnelle libre, un peu au-delà de nos mandats officiels. Dimanche 1O Janvier, l’opération nationale de « portes ouvertes » dans les mosquées a représenté une belle avancée au niveau de la ville de Rennes. Je témoigne ce qui s’est passé au Centre Avicenne où je suis impliqué. En un après-midi, 1500 personnes de toutes obédiences sont venues pour connaitre un lieu que pour la plupart elles n’avaient jamais fréquenté. Outre les nombreux échanges interpersonnels et les visites en groupe, 400 personnes ont participé assises par terre à un débat dans la salle polyvalente (où a lieu habituellement la prière) et dans les salles adjacentes. Etaient présents les 2 personnalités- piliers de la création du centre Avicenne il y a 10 ans : Mohamed Ben Hassel et, en toute discrétion, Edmond Hervè . Pour le débat, au micro, Ahmed le jeune président du centre, porteur d’une vraie politique d’ouverture, le nouvel Imam élu tout récemment par un vote du CA, et un Imam animant le débat et répondant aux questions sur l’Islam avec une grande compétence, Hubert Chardonnet et Geneviève Letourneux, représentant la ville au CA. Cette journée est le résultat de longues années d’efforts de personnes de l’ombre, de responsables musulmans ou non, de responsables des collectivités. Elle donne confiance pour aller plus avant pour de nouvelles initiatives d’ouverture. Nos actions à la base peuvent aider à créer un climat social moins violent. Elles nous permettent de mettre des mots sur ce qui nous fait peur. Elles peuvent faire reculer les approches sectaires, les replis, l’enfermement dans l’entre soi. Je prends quelques exemples de choses possibles. Beaucoup de jeunes musulmans se sentent discriminés. Certains enfouissent leur frustration. Ceux qui l’expriment disent que pour beaucoup de franco-français, si on a la peau colorée, on n’est pas vraiment reconnus comme français. Les statistiques disent que pour l’emploi, la discrimination reste forte. On ne peut pas couper à cet effort de faire davantage de place à la diversité partout sur la ville. Les discriminations, c’est sûr, sont un terreau pour les violences. Il y a besoin de se
parler en direct et longuement pour échanger sur nos
peurs réciproques. Une expression me frappe chez les jeunes
musulmans : ils disent : « nos ainés
ont trop fait profil bas et nous voulons
en sortir ». L’expression est à rapprocher de ce
que la rue exprime sur « on voit de plus en
plus en plus de voiles, il y a de plus en plus de
boucheries hallal, il y de moins en moins de musulmans
à offrir des jouets à leurs enfants pour Noël, ou.. On
les laisse beaucoup trop faire ; vous avez vu ce
que font ailleurs les Frères musulmans…» Comment peut-on avancer ? Echanger vraiment pour mieux comprendre ce qu’il y a dans la tête ou la culture de l’autre, demander aussi à chacun d’être conscient et davantage attentif à ce que l’acte qu’il pose provoque chez l’autre, et quand c’est possible échanger sur les accommodements qui peuvent calmer le jeu, en se centrant sur l’objectif de la meilleure vie possible ensemble. C’est le sens par exemple, me semble-t-il, de la position d’ouverture et d’accommodement prise par notre comité pour l’accompagnement des enfants en sortie scolaire par des femmes voilées. Comment se parler des sujets les plus sensibles comme celui des rapports hommes-femmes ? Avec prudence et respect certainement, surtout sans penser que nous occidentaux sommes parfaitement au top sur l’égalité, sur le respect de chacun et chacune, sur la fraternité entre tous, mais aussi avec le courage de l’échange. Lors du débat très ouvert du dimanche 10 avril, c’est sur la question de la séparation stricte entre les 2 sexes dans la mosquée que la première question a été posée par l’assistance et que nombre de participants ont exprimé leur insatisfaction de la réponse technique et pratique donnée par l’imam. Les différents débats organisés sur la ville au mois de mars vont permettre de développer une réponse davantage pluraliste. Nous avons besoin de reconnaitre d’abord que les différences d’approches culturelles sur le sujet sont différentes. Ce qui s’est passé à Cologne et en Allemagne en fin d’année est grave et inquiétant et nous concerne tous. Essayons de ne pas fermer les yeux et de nous en parler. Sur la question religieuse. J’ai la possibilité au centre Avicenne d’échanger avec de jeunes musulmans convertis. Ils sont nombreux. Ils expriment leur recherche du « vrai islam » qu’ils découvrent et approfondissent dans des rencontres interpersonnelles et dans la consultation d’internet. Ils expriment le besoin de trouver une cohérence d’ensemble pour leur vie, proche d’autres jeunes et moins jeunes à la recherche de sens, de fraternité et de spiritualité, pas seulement religieuse. On peut sans doute parler d’une sensibilité qui rejoint le développement des approches charismatiques dans toutes les religions. On peut penser qu’il y a chez ces jeunes convertis musulmans une recherche d’alternative globale comme on en a connu chez nous dans d’autres périodes, avec recherche de sécurités dans une mondialisation déstabilisante. L’association Coexister avec laquelle travaille et se retrouve le Centre Avicenne veut mettre en place un dialogue qu’elle appelle transconvictionnel entre les jeunes : c’est une piste. Pour terminer, on peut citer à nouveau comme initiative rassembleuse récente la déclaration commune et solennelle de l’ensemble des autorités religieuses rennaises appelant notamment à combattre ensemble l’ignorance et, citant Paul Ricoeur, à encourager ensemble « un travail d’interprétation des textes sacrés… pour un meilleur amour du prochain vécu en actes » . Je conclus sur une proposition au comité. Il y a beaucoup d’initiatives positives sur la ville. Serait-il possible d’introduire dans la charte de la laïcité rennaise (ou dans une annexe) des éléments qui ne font pas forcément accord unanime, mais relatent certaines expérimentations, certaines initiatives novatrices, de certaines propositions qui pourraient faire sentir la dynamique engagée et la conforter. Loic Richard Le 27 01 2016 |