Amis du Diocèse du Sahara (ADS)
SOMMAIRE DU SITE
Mise à jour du 3 novembre 2008
et du 28 septembre 2014

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Les CHAPITRES de " Désert, ma cathédrale"
Pour nos fidèles lecteurs,
Quelques extraits de l'ouvrage...
( les photos, gras, liens et couleurs sont de la rédaction ADS)
(cliquez sur les liens en bleu souligné)

Préface.Introït: chant d’entrée
par Mgr Michael L.Fitzgerald, M.Afr.

I. SURPRISES ET GRÂCES DE L’HISTOIRE 

De l’indépendance aux nationalisations: le temps
du développement  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Des nationalisations à la montée de l’islamisme radical:
le temps de la rencontre  . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Les années d’épreuve et de violence: le temps de
la faiblesse et des semailles  . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Et maintenant? Le temps du grain jeté en terre…
et qui germe  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Quels champs prioritaires pour l’Église d’aujourd’hui?
Annexe 1: Billet de Saïd Mekbel: « Comment et pourquoi?»
Annexe 2: Méditation chrétienne sur la réconciliation et le pardon

II. EN PELERINAGE VERS L’AUTRE 
Jésus, l’homme de la rencontre  . . . . . . . . . . . . . .
À la rencontre des siens  . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Au-delà des frontières  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

La mission comme relation, rencontre et dialogue 
Accueillir l’autre dans sa différence  . . . . . . . . . .
Être bien enraciné dans sa foi  . . . . . . . . . . . . . . .
Mission et être  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Être une présence fraternelle  . . . . . . . . . . . . . . . . .
Être témoin de l’amour de Dieu dans notre histoire
Être une Église pour les autres et avec les autres  . .

III. UNE VOCATION EN TERRE D’ISLAM 
Genèse d’une vocation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Premières approches  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
L’abbé Pierre et le père Mercier  . . . . . . . . . . . .
Premiers pas au pays de l’autre  . . . . . . . . . . . . .
Un islam composé de visages  . . . . . . . . . . . . . . .
Le Ribât Essalâm. Le Lien de la Paix.
Les premiers pas d’une expérience commune . . . .
Le lien avec le monastère de Tibhirine . . . . . . . . .
Le Ribât:une vocation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Une vocation à l’utopie au sein de l’Église universelle
Le témoignage d’une croyante de l’«autre rive» .

IV. AU DÉSERT  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Un coin de notre terre  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Un espace intérieur  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Un lieu d’accueil et de patience  . . . . . . . . . . . . . . .
Le désert, premier barrage pour les migrants  . . . . .
Le désert, entre l’exil et l’oubli: les camps
de réfugiés sahraouis  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Le désert, un lieu de vie choisi par Charles de Foucauld


V.  VENT DE SABLE, SOUFFLE DE L’ESPRIT 

Le Sahara, terre d’accueil et d’enracinement . . . .
Un désert tiraillé entre abondance et pauvreté  . .
La vie culturelle et religieuse à l’épreuve
de la mondialisation  . . . . . . . . . . . . . . . .
Notre Église diocésaine.Au rythme de la vie des Secteurs
Le Hoggar  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
L’Ouest – Saoura  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
L’Atlas saharien et les hauts plateaux (Nord-Ouest)
Des confins du Grand Erg à la vallée du Mzab  ..
Sur les bords du Grand Erg oriental  . . . . . . . . . ..
Les fondations évangéliques d’une Présence  . . . .
Prière,Eucharistie et vie fraternelle  . . . . . . . . . . . .
Engagement dans le service de l’autre  . . . . . . . . .
Enracinement et adaptation  . . . . . . . . . . . . . . . . .
Nos engagements sur le terrain  . . . . . . . . . . . . . . .
Soucis d’aujourd’hui… et de demain  . . . . . . . . . .
Et maintenant? Dans le vent de sable et le souffle de l’Esprit  . .

Final:   UNE MESSE EN ISLAM. Méditation eucharistique

Chant d’entrée 
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Liturgie pénitentielle  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Gloire à Dieu  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Liturgie de la Parole  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Offrande  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Prière eucharistique  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Communion  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Action de grâces et envoi  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

© rédac ADS

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A l'occasion de la parution de "Désert, ma cathédrale",
Mgr Claude Rault, évêque du Diocèse du Sahara algérien ,tient à Paris
Conférence en l'église
St Denys du St Sacrement

Mercredi 19 novembre 2008 à 20h 30.

Sur RFI radio france international
DIMANCHE  24  novembre à 19h 40

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Radio Notre Dame LUNDI  25 NOVEMBRE à 14h30
Interview par Denise DUMOLIN

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Sur RCF, MERCREDI 31 DECEMBRE à 17h & Dimanche 4 janvier à 19 h 30
ensuite sur le web

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Autres enregistrements de la voix de l'évêque au désert en CD ou sur le web
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Retraite prêchée à Notre Dame de la Salette en septembre 2008. Disponible sur CD, près du Père Hervé Bougeard Recteur Sanctuaire NDS - F- 38 970 La Salette
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En partenariat avec croire2.gif  béatification de Frère Charles de Foucauld interview de Mgr RAULT en vidéo : la voix de l'évêque du désert
& le NOTRE PERE  chanté en arabe (cliquez sur l'image)

Suivez aussi la presse écrite,  les journaux " La CROIX", la Manche Libre, Témoignage Chrétien,...

 L'avis des éditeurs      Etonnant personnage que celui de Mgr Rault, évêque de Laghouat au sahara ! ses fidèles, une poignée de chrétiens en terre musulmane ! son diocèse, une vaste étendue de désert, de sable et de cailloux, qu'il sillonne en voiture ! la figure qui le marque, Charles de Foucauld, qui a fini ses jours ici, à Tamanarasset. " mon intention est de porter un regard sur ce qu'a vécu et vit encore aujourd'hui notre église d' Algérie, écrit Mgr Rault, au fil de l'histoire de ce pays, tout en y dévoilant ma propre trajectoire. Ce sera donc le tissage de plusieurs histoires entrelacées. " dans ce témoignage, Mgr Rault évoque en particulier sa relation avec l' Islam, les hommes et les femmes d' Algérie. il raconte son expérience du travail comme dinandier, dans la fabrication artisanale des plateaux de cuivre. il relit l'evangile pour mieux mettre en valeur Jésus, comme figure centrale de la rencontre et du dialogue, au coeur du désert.
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Quelques extraits de l'ouvrage...

( les photos, gras, liens et couleurs sont de la rédaction ADS)
Préface : Introït: chant d’entrée

Ayant eu le privilège de transmettre le sacrement de l’ordre à son plus haut degré, l’épiscopat, à Mgr Claude Rault (que je vais appeler simplement Claude), c’est une joie pour moi de contribuer à son livre par un introït,un chant d’entrée. Ce sera un chant de louange,de reconnaissance, d’action de grâces.
...
 Claude vit sa vocation, dans toutes ses dimensions, avec passion. Il ne la vit pas seul. Il y a d’abord tous les Algériens qu’il côtoie, qu’il est appelé à enseigner, ou avec qui il travaille.Il donne,mais il reçoit aussi.Il y a ses confrères,les autres prêtres et religieux,les religieuses,les laïcs engagés,les permanents de l’Église d’Algérie. Surtout comme évêque, il entre dans une tradition de l’Église qui est en Algérie. Cela lui fut rappelé au cours de l’homélie à son ordination épiscopale: «Soutenu par le Seigneur,et par l’Esprit qui sera invoqué sur toi,tu auras aussi l’appui de tes confrères dans l’épiscopat.»

«Tu n’es pas seul; tu entres dans le collège des évêques ayant à sa tête l’évêque de Rome, le pape Jean-Paul II. Tu assumes d’ailleurs une part de responsabilité pour l’Église répandue à travers le monde, mais tu devras pouvoir compter sur l’aide d’autres Églises et d’autres évêques. Tu fais désormais partie également de la Conférence épiscopale régionale du nord de l’Afrique. Là aussi tu auras à donner, mais tu recevras sûrement beaucoup à travers les réflexions de tes frères.Tu expérimenteras la force de la communion.

Et que dire de la tradition dans laquelle tu t’insères ? Tu as devant toi l’exemple de tes prédécesseurs,Georges Mercier, Jean-Marie Raimbaud et Michel Gagnon,pour ne mention-
ner que les trois derniers que, toi et moi,nous avons connus personnellement. Mais la tradition du diocèse du Sahara remonte à notre Fondateur, le cardinal Lavigerie, lui-même délégué apostolique pour le Sahara.Tu peux te référer aussi, comme modèle, à un autre cardinal, le cardinal Duval, si aimé dans ce pays. Il y a également la figure de Pierre Claverie, qui, comme le Christ, “ayant aimé les siens, les a aimés jusqu’à l’extrême”.

Une vie donnée, qui se donne encore, et qui se donne à nous à travers les descriptions et les réflexions partagées dans ce livre. Nous pouvons bien louer Dieuet lui rendre grâces pour ce don: un livre qui pourrait bien accompagner nos voyages dans les déserts de la vie moderne, et qui nous encouragera à continuer notre route comme “chercheurs de Dieu”.»  ...

bookcr_fichiers/ordineveq1.jpgMgr Michael L.Fitzgerald, M.Afr. En la fête du Sacré Cœur, 30 mai 2008
                             
© rédac ADS                

Jésus, l’homme de la rencontre

Prenons donc avec lui les chemins de Galilée. Jésus a été, plus que personne, « l’homme de la rencontre et de la relation».
Le Dieu en qui nous avons mis toute notre foi,à qui nous avons confié toute notre existence, est essentiellement être de relation, amour communicatif, et nous l’exprimons à travers cette vision théologique qu’il a fallu forger: celle de «Trinité»… appellation que ni Jésus ni les Apôtres n’ont jamais utilisée eux-mêmes. Ils étaient plus soucieux de nous faire voir Dieu que de le définir.Mais cette foi en Dieu Unique et Trinité est bien notre trésor et de celui de tout chrétien!

Jésus, à travers sa vie, nous a surtout montré ce Dieu, il nous l’a révélé, non pas d’abord comme une vérité à croire et à proclamer, une morale à suivre, mais une expérience à vivre.
«Dieu,c’est une expérience»,disait Maurice Zundel, ce prêtre suisse devenu errant à cause de ses conceptions quelque peu osées sur Dieu et sur l’Homme. La connaissance de Dieu et la foi en Lui ne sont pas le fruit d’une déduction intellectuelle, elles s’inscrivent dans une cohérence de vie. Saint Jean le dit dans l’une de ses lettres aux premiers chrétiens: « Quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu»(1 Jn 4,7).Beaucoup croient le connaître et ne le connaissent pas, beaucoup le connaissent et ne le savent pas! La vraie connaissance trouve sa source dans une certaine façon d’aimer. Les chrétiens ne peuvent donc prétendre être les seuls à connaître Dieu,puisqu’ils ne sont pas les seuls à l’aimer.
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Mais… rejoignons Jésus sur les chemins de Palestine, au début de sa vie publique.Que fait-il? Il baptise? Il ne semble pas qu’il ait baptisé lui-même.La seule trace que nous ayons de son activité baptismale est dans l’Évangile de Jean:« … Jésus se rendit avec ses disciples au pays de Judée. Il y séjourna avec eux,et il y baptisait» (Jn 3,22). Dans ce même Évangile, un peu plus loin Jean précise: «… bien qu’à vrai dire ce ne fût pas Jésus qui baptisât,mais ses disciples» (Jn 4,2).
    Cette activité n’est donc pas première dans sa mission et dans sa vie. Il s’agissait avant tout pour lui d’annoncer «la Bonne Nouvelle du Royaume»,et nous sommes là au cœur de sa «mission».

Comment s’est-elle manifestée? Par quels gestes annonçait-il cette «Bonne Nouvelle»? Comment mettait-il au jour ce «Royaume de Dieu» qu’il était venu révéler? Ce terme de «Royaume» est tout à fait énigmatique, et il est encore plus difficile à expliquer à une mentalité moderne. Jésus ne l’a jamais expliqué! Mais il en a montré les signes, les effets, la façon de le manifester. Là encore ne cherchons pas de savante définition. Regardons-le: ce Royaume s’incarne en lui,ce Royaume,c’est Lui:une façon radicalement nouvelle d’être en relation avec Dieu et les autres! Et nous sommes heureux aujourd’hui, à travers nos humbles existences de pouvoir mettre nos pas dans les siens et laisser deviner ce «Royaume» qu’il a laissé pressentir. Le tout se situe dans un rapport vivant et cohérent avec Dieu et le prochain, spécialement le plus simple, le plus petit, le plus lointain,sans la prétention de «savoir» mieux que les autres.









Désert, ma cathédrale   Page 65
© rédac ADS



Le Sahara,terre d’accueil et d’enracinement

Je ne voudrais pas entamer cette description en sociologue ni en
économiste,encore moins en propriétaire – je me prends
moi-même en défaut lorsque je parle de «mon» diocèse –
mais avec le regard d’un hôte accueilli, qui ne saurait être
étranger à tout ce qui façonne l’humanité concrète où il a
poussé des racines.

Notre diocèse est géographiquement composé de
l’ensemble du Sahara algérien, des hauts plateaux, et de
l’Atlas saharien. Vaste région aux paysages extrêmement
variés du nord au sud.Selon les saisons,on peut y crever de
chaleur ou de froid, être bloqué par la neige ou le vent de
sable. Il n’y a pas que des dunes, mais aussi des massifs
montagneux comme l’Atlas,des plateaux pierreux et unifor-
mément plats tel le vaste Tademaït (plusieurs centaines de
milliers de kilomètres carrés). Il renferme des massifs
volcaniques et tourmentés comme le Hoggar,ou granitiques
comme le Tassili… Les oasis sont maintenant de grands
complexes urbains, qui peuvent connaître aussi leurs
problèmes de banlieues! Sauf exception,l’image de la petite
oasis paisible cachée entre les dunes et endormie sous les
palmiers avec une caravane qui passe sur le sable chaud n’est
plus qu’un beau rêve.

   La population de cette vaste région peut s’évaluer à
environ trois millions cinq cent mille habitants. Le prochain
recensement sera plus exact que cette approximation.

Voici plusieurs milliers d’années, le Sahara avait l’allure
d’une belle steppe riche en animaux sauvages. Il était déjà
peuplé de tribus préhistoriques dont l’origine se perd dans la
nuit des temps.Des vestiges impressionnants témoignent de
leur très ancienne présence. Il suffit d’en prendre à témoin
les fameuses peintures des grottes du Tassili, les gravures
rupestres des Hauts Plateaux,et le nombre très varié d’outils
de pierre trouvés un peu partout. À l’époque historique, le
fond originel de cette population était de race noire ou
« nilotique » et de langues berbères. On les appellait
communément les Zénètes. Ce fond originel est resté, mais
les dialectes berbères n’ont pas résisté à la poussée de la
langue arabe. Seule une partie de la population berbère a
gardé sa langue maternelle. C’est le cas des Touaregs, d’une
partie de la population du Gourara, de Ouargla, de
Ghardaïa.  La plus grande partie de la population parle
maintenant l’arabe dialectal, langue en pleine évolution car
elle subit de plus en plus l’influence de l’arabe littéraire,par
le fait de la scolarisation,de la presse et de la multiplication
des chaînes de télévision arabe.
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© Éditions Desclée de Brouwer 
Cette population s’est beaucoup modifiée ces deux
dernières décennies.Les années 1990,avec les violences que
l’on sait, ont vu affluer beaucoup de gens du Nord qui ont
cherché refuge dans cette vaste région jugée un peu plus
calme et hospitalière. La recherche d’un travail a aussi
poussé beaucoup de jeunes à émigrer vers le sud.Beaucoup
y ont d’ailleurs fondé une famille et s’y sont fixés.

 Les oasis sont donc maintenant constituées de populations
« mêlées » voire métissées, même si les habitants d’origine
n’ont pas toujours vu d’un bon œil ces nouveaux venus
affluer, prendre souvent des postes de travail dont ils se
sentent privés, et grossissant des villes déjà en mal de crois-
sance.Il s’ensuit que le caractère spécifique de ces oasis a subi
un sérieux coup. Que dire par exemple d’une ville comme
Tamanrasset? Du temps du père de Foucauld, elle n’était
qu’un tout petit village de quelques familles vivant sous des
zribas(abris de roseaux).Elle est devenue une grande cité de
près de cent mille habitants, ville de refuge ou d’accueil de
populations venues de Kabylie, des hauts plateaux, et aussi
point de transit pour les Subsahariens dans leur tentative de
transhumance vers les pays d’Europe.Ces changements sont
le fruit de toute évolution, et le Sahara, comme toute autre
région,n’est pas à l’abri de la mondialisation.


Cependant, le fond de la population ne s’est pas encore
effrité dans ses structures traditionnelles, la famille n’a pas
trop éclaté, comparativement aux villes du Nord. Elle reste
un pôle de référence et de solidarité.Il n’en est pas de même
pour la population récemment arrivée qui a perdu ses points
de repère tribal ou familial, a subi une évolution plus
brutale,et se trouve plus fragilisée,manquant de cette solida-
rité qui constitue, comme l’on dit, la Sécurité sociale des
pauvres.


Désert, ma cathédrale   Page 155
© rédac ADS

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L’abbé Pierre et le père Mercier
(ci-dessous Mgr Mercier célébrant la messe à Béni-Abbès, la photo étant prise par l'abbé Pierre lui-même, tient à souligner le Père Mercier au Père  Michel  Gagnon -auquel est adressée cette carte - alors à Hodeida (Al Hudaydah) au Yémen du Nord.
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Le premier pas vraiment déterminant, je le dois à l’abbé Pierre et à Mgr Georges Mercier, alors évêque du Sahara.
En décembre 1961, je faisais mon service militaire dans une caserne de France, et je venais de finir mes classes. Je bénéficiais d’une courte permission. L’abbé Pierre et ses compagnons étaient venus faire une campagne de ramassage de ferraille, de vieux papiers, de chiffons et autres matériaux dans la région. Un soir, le 9décembre, il donna une grande conférence dans le hall du Haras de la ville d’Avranches, dans la Manche, et Mgr Mercier, avec lequel il était très lié, projeta un film sur la récente évolution du Sahara. Cet évêque avait entendu l’appel de la jeunesse algérienne et avait mis en œuvre la construction et la bonne marche de centres de formation professionnelle dans son diocèse pour permettre aux Algériens de bénéficier au moins des miettes de la manne pétrolière en leur proposant une formation professionnelle appropriée. Seules les grandes compagnies françaises et étrangères en effet en ramassaient les dividendes: nous étions encore en pleine période coloniale.

Bref, au début de la soirée, Mgr Mercier nous projeta un film sur le Sahara.Ce film,j e m’en souviens, était abîmé par une rayure qui traversait l’image de haut en bas. L’évêque saharien nous confia que cette faille était celle de la souffrance d’un pays traversé par l’injustice! Après la projection du film, l’abbé Pierre prit longuement la parole. Ses mots sonnent encore à mes oreilles avec des accents prophétiques :

«Écoutez bien ce que je vais vous dire, dit-il en substance. Écoutez bien ce que je vais vous dire! Beaucoup de pays
d’Afrique viennent d’accéder à l’indépendance. D’autres sont en passe de le faire. Nous allons laisser derrière nous des pays qui sont loin d’obtenir notre degré de développement. Nous avons profité de leurs richesses, notre pays s’est développé grâce à ce que nous sommes allés chercher chez eux. Nous avons le devoir de les aider à acquérir un degré de développement digne et juste. C’est urgent.
Si nous ne le faisons pas,
ils viendront eux-mêmes chercher chez nous ce qu’ils ne trouvent pas chez eux, et nous n’aurons pas le droit de leur refuser!
»

Il disait cela… voici plus de quarante-cinq ans! Les tragiques transhumances subsahariennes d’aujourd’hui et les
nombreux migrants qui s’amassent dans nos pays du Maghreb ne lui donnent-ils pas raison
? Cet événement fut
donc une première sensibilisation sérieuse. Mais le pas décisif n’était pas encore fait de façon définitive.

Désert, ma cathédrale    Page 106
© rédac ADS ( les photos, gras, liens et couleurs sont de la rédaction ADS)
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Un lieu d’accueil et de patience

Cette évocation du désert fait de terre et d’esprit m’invite à
contempler la profondeur de cette humanité qui lui donne
une âme.Traverser le désert, c’est à coup sûr être accueilli.
L’accueil de l’autre, surtout lorsqu’il est étranger, n’est pas
que proverbial. Il est réel. L’hospitalité y est sacrée. Je l’ai
maintes fois éprouvé: l’hôte est l’envoyé de Dieu et traité
comme tel,quelle que soit l’heure ou la circonstance de son
arrivée. L’empressement de notre ancêtre Abraham à
recevoir ses trois visiteurs inconnus n’est pas de la légende.
L’entraide et la solidarité vont de soi. Il ne peut en être
autrement.Mais l’hospitalité a ses rites.On n’importune pas
l’hôte qui reçoit… Il en est de sa durée comme du nombre
des verres de thé:«tlêtaou bâb,arbaa lil’ahbâb»… «trois et
la porte,quatre pour les amis».Une règle de politesse qui a
cependant ses belles exceptions: Tayeb, un de nos amis a
recueilli chez lui par une nuit glaciale le fou du village. Il l’a
accueilli chaque nuit pendant plusieurs années alors que la
vie était dure et qu’il avait une nombreuse famille à nourrir.
Il a toujours considéré ce geste comme normal, et n’a jamais
été décoré pour cela!

À côté de l’hospitalité, comme compagne de cette vertu
nomade, je placerai la patience… Un ami me rapporta une
tradition remontant au Prophète de l’islam. Un de ses
compagnons lui demanda: « Quelles sont les trois grandes
vertus dont doit se munir un musulman?» Et le Prophète de
répondre:«La première c’est la patience,la seconde c’est la
patience,et la troisième… c’est la patience!»

Oui,de la patience,il en faut! Attendre la pluie, le bus qui
ne vient pas, le chameau au bord du puits, l’heure du ftour
(rupture du jeûne) aux journées d’été. Voici une trentaine
d’années, le Ramadan tombait juste en plein été. Je demandai
à Bachir,notre cuisinier,comment il allait faire pour affronter
cette dure épreuve. « Mais nous patienterons, mon père! »
Tout était dit:«La patience est la clé du paradis.» Suis-je sûr
de l’avoir bien accrochée à mon trousseau de voyage? N’est-
elle pas celle qui ouvre aussi la porte du désert?


Désert, ma cathédrale   Page 141
© rédac ADS



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le gite diocésain de Tamanrasset

Le désert, premier barrage pour les migrants

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Mais cet espace d’hospitalité et d’accueil peut aussi être une
terre interdite. Le Sahara est en effet un grand couloir de
migrations subsahariennes.

Un contrôle de gendarmerie barre la route.Un minibus est
arrêté et les agents vérifient les papiers.Trois Africains seront
laissés sur place,avec leur maigre bagage.Peut-être auront-ils
la chance de pouvoir prendre le bus suivant? Pour un retour
à la case départ, ou pour une nouvelle étape dans leur
transhumance. Le désert est aussi un mur, une mer, une
marâtre. On y meurt beaucoup ces temps-ci. C’est le
premier bastion, le premier rempart entre l’Occident et
l’Afrique subsaharienne. Les migrants venus du Nigeria, du
Liberia, du Cameroun, du Congo ou autre pays africain en
savent quelque chose.

La traversée n’a pas pour eux le charme d’un voyage
touristique.Ils ont souvent amassé avec patience les quelques
milliers d’euros nécessaires au départ pour se voir souvent
dépossédés rapidement de cette manne de papier.Ils arrivent
dans les oasis affamés, assoiffés, souvent dépouillés de tout, et
ne doivent leur subsistance qu’à la solidarité de leurs
compagnons qui les précèdent. Non, ce n’est pas un voyage
touristique qu’ils ont entamé, mais une aventure dont ils
n’ont pas pu ou voulu mesurer les dangers.Danger de la soif,
de la faim, de la corruption des passeurs, de la cupidité des
réseaux qui leur promettent le paradis occidental.

S’ils ont quitté leur pays,leur famille,leur village,ce n’est
pas nécessairement par goût de l’aventure,mais par nécessi-
té. Le miroir aux alouettes des sociétés occidentales où un
proche a réussi,où un frère a fait petite fortune,où un cousin
a presque miraculeusement atterri, est parvenu à les
convaincre et à faire sauter leurs dernières hésitations.Et ils
sont partis,souvent poussés par leur propre famille qui s’est
saignée à blanc pour trouver la somme nécessaire.Et ils sont
partis sans autre retour possible que celui de la réussite en
poche.Dès lors les ponts sont coupés.Je connais un migrant
qui a été reconduit trois ou quatre fois à la frontière et qui
est toujours revenu. Et pour la plupart, ils sont prêts à la
même épreuve,au même risque.
S’ils quittent leur pays, c’est bien parce que l’horizon de
leur avenir est devenu un désert! Alors désert pour désert,
autant partir que de dessécher sur place! S’ils partent ainsi,
c’est parce qu’ils sont en quête de travail, c’est-à-dire de
dignité et de moyen de vivre, tout simplement. Le travail,
même pénible,est au moins un signe que l’on est homme et
que l’on peut redresser la tête. Et si ce droit ne leur est pas
donné, ils vont le chercher ailleurs, quitte à affronter les
dangers du désert,avant de faire face à ceux de la mer.

Désert, ma cathédrale   Page 143
© rédac ADS


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Une messe en islam
Méditation eucharistique
Chant d’entrée

L’appel à la prière vient de retentir dans l’aube nouvelle,
et son cri a réveillé les croyants endormis.
Allah Akbar! Dieu seul est Grand!
Cet appel qui vient de l’autre,m’invite,Seigneur,à me
tourner moi aussi vers Toi.
Tu m’arraches à ma nuit,
à toutes les forces des ténèbres qui tentent d’envelopper
toutes choses.
La triple affirmation de Ta grandeur m’éveille
à cette journée qui commence.
Qu’elles soient bénies,
et qu’elles soient le reflet de Ta présence,
ces heures qui s’ouvrent devant moi,
les rencontres imprévues,et celles que j’attends.
Voici que déjà Tu frappes à ma porte,porté par une voix
qui me crie que Tu es.
Et Tu me rappelles que Toi Seul es Grand.
Il n’y a pas d’autre Dieu que Toi.

Je me prosternerai donc devant Toi,l’Hôte de ma nuit,
et je T’ouvrirai la porte de mon cœur.
Entre donc et viens dilater mon être,
l’élargir aux dimensions du monde.
Toi qui es si grand,si humble et si petit,
viens occuper tout mon espace
pour qu’il n’y ait pas dans ma vie d’autre Dieu que Toi.
Viens purifier mon Temple,
et en chasser toutes les idoles qui l’encombrent.
Que jamais n’y entrent les faux dieux
de la violence,de l’argent et du pouvoir trompeur,
idoles vieilles comme le monde,mais toujours renaissantes.
Il n’y a pas d’autre Dieu que Toi.
Que cette affirmation prenne corps et âme tout au long de
cette journée.
Quelle que soit la main qui frappera à ma porte,
que j’y reconnaisse la Tienne.
Quel que soit le visage qui croisera ma route,
que je puisse y voir le Tien.
Toi l’hôte invisible,le mendiant caché,le frère proche,
l’enfant innocent,l’inconnu rencontré,
Tu Te caches derrière tant de visages humains!
Et Tu fais de chaque rencontre
une surprise toujours renouvelée.
Il n’y a pas d’autre Dieu que Toi.
Avec les croyants qui se prosternent à la pointe de ce jour,
je me prosterne moi aussi.

Avec ceux et celles qui invoquent Ton Nom,
dans les Mosquées,les Églises,et les Monastères.
Avec ceux et celles qui ne peuvent que lever les yeux vers
Toi,malades,vieillards,
je me prosterne.
Avec ceux et celles que garde à la maison
l’œuvre du quotidien;
avec ceux et celles que le travail retient
à l’usine,à l’atelier,aux troupeaux et aux champs,
je m’incline.
Avec tous les croyants qui suivent le chemin du total
Abandon,
qui remettent leur vie entre Tes mains,
et se soumettent à l’Esprit de leur Écriture,
je Te prie.
Donne-moi un cœur large et généreux,élargis mon horizon,
et que ma prière devienne ainsi vraiment universelle.
Il n’y a pas d’autre Dieu que Toi.


Une messe en Islam

 Désert, ma cathédrale   Page 189
© rédac ADS
Gloire à Dieu

Que la Gloire Te soit rendue à Toi le Seigneur des mondes,
le monde de la terre,et celui du ciel,
le monde du visible et celui de l’invisible,
le monde de l’infiniment grand et le monde de l’infiniment petit.

Gloire à Toi pour l’homme et la femme,
Tes intendants sur la terre,Ton image,
que tu créas de l’argile et d’une étincelle de Ton Esprit.
Gloire à Toi pour Jésus,ton Verbe éternel.
Il a pris chair en Marie,
par Toi appelée et mise sous Ta protection.
En elle toutes les femmes sont exaltées.

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© rédac ADS
Offrande

Je T’offre,Seigneur,
le pain que vient d’apporter la petite voisine,
ou encore la galette de la veuve,
venue partager son indigence.
Et je place,tout à côté,
la vie de mes frères et sœurs de l’islam.
Reçois toutes ces existences
pétries au gré des épreuves et des joies de leur temps.
Les pauvres,les assoiffés de justice,les abîmés de la vie.
Accueille la prière de ceux et de celles qui se prosternent,
et qui savent si bien Te prier dans leur cœur.

Je T’offre le fruit des raisins mûris sur nos collines.
À travers le vin,reçois cette terre en croissance,
l’écrasement de toutes les nations endettées,
le travail du paysan,de l’ouvrier exploité,
de la femme cloîtrée et humiliée dans sa demeure close.

Tout à côté je placerai aussi
l’ivresse de ceux et de celles qui Te cherchent,
la joie du foyer qui se construit,
le youyou qui annonce une nouvelle naissance,
les jeux des gosses dans la rue,
la fête qui éclate au son des tambours.
Et les yeux du vieillard qui se ferment
pour mieux voir Ta Lumière.
Tout ce monde est là,présent:
les mains qui se tendent pour la louange ou la supplication,
les corps qui se courbent et se prosternent,
ceux qui jeûnent
pour sentir la privation du pauvre et partager avec lui.
Tout ce monde en gestation,en douleur d’enfantement,
je Te l’offre Seigneur,parce qu’il m’habite.
Tu en as besoin pour en faire le Corps et le Sang de Ton Fils.

Une messe en Islam
 Désert, ma cathédrale   Page 193
© rédac ADS


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Pour le 150° anniversaire de la naissance de Charles de Foucauld à Strasbourg  bookcr_fichiers/boutonhaut.jpg
célébration en septembre 2008 , en la cathédrale
Bienheureux Charles de Foucauld (1858 - 1916)
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